L'ARCHITECTURE VERNACULAIRE

     
ISSN 2494-2413 TOME 36-37 2012-2013

Mustapha Ameur Djeradi

L’ARCHITECTURE KSOURIENNE (ALGÉRIE) ENTRE SIGNES ET SIGNIFIANTS

 

Résumé

La production des formes architecturales obéit à un processus long et complexe qui aboutit à une modélisation physique. Le modèle produit est imprégné par différents aspects qui agissent individuellement ou collectivement sur l’objet produit (aspects technique, économique, climatique, sociologique et religieux). Il nous paraît pertinent aujourd’hui de cesser de ne voir dans l’ « architecture du sacré » qu’une « architecture de spontanéité » sans règle ni modèle. Cette production se révèle être le résultat d'une planification rigoureuse et autrement plus complexe en ce sens où a été pris en considération, non seulement le rationnel mais encore et surtout, ce que d’aucuns perçoivent comme de l’irrationnel : le spirituel

Abstract

The generation of architectural forms is a lengthy, complex process that results in a physical design. This design is pervaded by the various aspects  – technical, economical, climatic, sociological and religious – that individually or collectively affect the object produced. It seems to us that today it is relevant to stop seeing the "architecture of the sacred" just as a form of "spontaneous architecture" devoid of rules and models. The object produced reveals itself to be the result of rigorous, infinitely more complex planning, in so far as not only the rational but also and above all what is perceived by some to be the irrational – the spiritual – has been taken into account.

 

« L’évidence première n’est pas une vérité première,
n’est pas une vérité fondamentale... »  [1]

Introduction

Pierre Deffontaines rappelle que « les hommes, devant la terre à peupler, n’ont pas eu que des attitudes utilitaires » [2]. Sinon, comment peut-on choisir d’habiter des espaces aussi peu cléments ? En suivant ce que Deffontaines prescrit, il n’y a pas que les facteurs utilitaires et matériels qui ont un impact sur la forme de la maison ksourienne, d’autres paramètres, liés au sacré, sont à prendre en considération.

En observant de très nombreux exemples de ksour, nous avons tenté de dégager les éléments qui contribuent à leur forme. En nuançant certaines théories trop simplistes concernant l'influence du climat, des matériaux de construction ou d’autres effets, nous avons essayé de montrer que ces conditions ne sont pas déterminantes.

La cosmogonie du groupe est souvent à l'origine des conceptions de l'habitat, la technique ne vient que pour concrétiser, en tenant compte des contraintes environnementales. Depuis Martin Heidegger [3] nous savons que l'acte de bâtir ne précède pas l'acte d'habiter, c'est plutôt l'inverse, car l'homme est un être naturellement « habitant ». Dans son livre « Pour une anthropologie de la maison », Amos Rapoport montre que les explications à partir du climat, des matériaux, de la technologie, du site, de l’économie restent insuffisantes pour expliquer la forme. D’autres paramètres plus complexes d’ordre culturel, moral et spirituel interviennent d’une manière moins évidente certes mais bien certaine [4]. Lewis Mumford dans son ouvrage, « La cité à travers l'histoire » [5], a montré comment l'homme obéit dans le choix de ses sites d'implantation à des paramètres divers et difficilement quantifiables. De prime abord, notre réflexion s’inscrit dans une « démarche » libérée des réflexes stéréotypés qui, par excès de « rationalité », ont fait de l’architecture comme de l’urbanisme des disciplines entièrement instrumentales. Par notre questionnement nous avons installé une dualité en mettant le latent et le manifeste ensemble au cœur d’une problématique d’architecte :

« Quel serait le contenu latent des éléments constituant la maison ksourienne ? ».

1 - Pourquoi revisiter l’architecture ksourienne ?

Nous pourrions nous demander pourquoi il faudrait étudier l’habiter dans ces anciens établissements humains ? Le postulat de toute approche historique est que le passé est instructif, que non seulement l'étude du passé a une valeur philosophique mais qu'elle nous fait découvrir la complexité et l'imbrication des choses. La maison ksourienne est soumise à des forces variées et souvent contraires qui bouleversent les schémas ordonnés, les modèles et les classifications que nous aimons à construire. Les complexités de l'homme et de son histoire ne peuvent être circonscrites par d'élégantes formules, bien que le désir de le faire caractérise notre époque.

La question reste posée : pourquoi étudier encore la forme des maisons ksouriennes dans un monde qui change si vite ? Une raison en est que ces établissements humains sont l'expression immédiate d’un mode de vie qui constitue un domaine d'étude très fructueux. À cet égard un autre aspect important est le besoin que nous avons d'études comparatives, et ceci pour deux raisons. D'abord, d'un point de vue pratique, différentes cultures coexistent dans nos cités, avec en conséquence, des besoins et des modèles différents pour les habitations et l'organisation sociale. Décrire et examiner les formes des habitations dans les ksour, rechercher les causes, les explications à leurs formes, à leurs localisations, sont les objectifs de la présente réflexion. Notre ambition n’est pas de résoudre entièrement et encore moins définitivement les questions que soulèvent nos préoccupations. Nous restons conscient que celles-ci réfèrent à un champ de réflexion plus vaste et multidisciplinaire. Néanmoins nous espérons par ce travail poser les prémices d’une approche interdisciplinaire par laquelle l’urbanisme comme l’urbaniste s’imprègnent davantage de dimensions relatives aux données « mythico-rituelles ». Nous nous interrogeons alors sur la forme et la dimension cachée de la maison ksourienne.

L'environnement bâti de l'homme n'a jamais été et n’est toujours pas commandé par les spécialistes (architecte, urbaniste, etc.). Cet environnement était le résultat d'une architecture populaire, et cela l'histoire et la théorie de l'architecture l'avaient ignoré en grande partie. Pourtant tel était l'environnement d'Athènes à son apogée, des cités mayas et des cités proches des tombes et des temples.

Le charme et la vitalité des formes traditionnelles, face à la fadeur, l'ennui et la monotonie des nouvelles formes dessinées par les architectes, sont dus à bien plus que le simple charme du pittoresque. L'unité du plan, du site et des matériaux des cités anciennes engendre une réaction enthousiaste même chez la plupart des spécialistes. Cette réaction est en grande partie suscitée par l'harmonie du paysage. Un sentiment d'intimité est créé par une série de murs qui non seulement ferment l'espace mais lient les maisons les unes aux autres et les relient au paysage.

Dans les nouveaux établissements, les normes urbanistiques et réglementaires détruisent la sensation d'intimité et le lien avec l’environnement. Les nouveaux éléments visuels n'expriment plus la relation de l'individu au groupe, ni du groupe à la terre. La hiérarchie très nette des agglomérations primitives et vernaculaires est perdue, reflet de la disparition générale des hiérarchies dans la société, et tous les bâtiments tendent à avoir une importance égale. La désacralisation de la nature a abouti à la déshumanisation de nos relations avec la terre et le site.

L'homme moderne a perdu l'orientation mythologique et cosmologique qui était si importante pour l'homme primitif. Il a aussi perdu l'image collective de la bonne vie et de ses valeurs, à moins de dire qu'il possède l'image collective de l' « absence » d'images. Les forces et les contraintes sont aussi bien plus complexes, et les liens entre la forme, la culture et le comportement sont plus ténus ou peut-être simplement plus difficiles à suivre et à établir.

Notre époque est une époque de contraintes matérielles réduites. Nous pouvons faire bien plus de choses qu'autrefois, et les contraintes sont plus faibles que jamais. Il en résulte le problème du choix excessif, la difficulté de sélectionner ou de trouver des contraintes qui surgissaient naturellement dans le passé et qui sont nécessaires pour créer des formes de maison significatives.

2 - Cadre conceptuel

« L’essentiel d’une théorie réside dans le sens que l’on donne aux mots. Quand on utilise le vocabulaire des autres, on entre dans leurs systèmes. Pour résoudre les problèmes, il faut les décomposer en concepts, les nommer par des mots et les recomposer. » [6]

S’il y a un fait sur lequel l’ensemble des linguistes toutes spécialités confondues restent d’accord, c’est que « La traduction n’est jamais fidèle ». Un signifiant, mot, signe ou symbole retenu pour matérialiser un sens,celui du signifié en l’occurrence, reste totalement tributaire du contexte de production, de son évolution à travers le temps, des caractéristiques et des normes intrinsèques à la langue d’origine et plus encore aux systèmes de représentation mentale et cognitive des locuteurs comme celui des récepteurs. C’est pourquoi nous avons jugé utile et incontournable d’insérer dans ce travail ce paragraphe destiné à fixer les contenus sémantiques que nous réservons aux concepts clés de la présente contribution.

a - Ce que ksar veut dire

Le mot se prononce « gsar ». C'est une altération phonique de la racine arabe qasr qui désigne ce qui est court, limité. C’est à dire un espace limité, auquel n’a accès qu’une certaine catégorie de groupes sociaux. C’est un espace confiné et réservé, limité à l’usage de certains. Le ksar (pl. ksour) est un grenier, mieux encore un ensemble de greniers bien ajustés [7].

Il est surprenant de voir naître le ksar au XIe siècle comme le préconisent de nombreux historiens et géographes. En effet les aménagements judicieux dont il dispose, la technique qui le fonde, sont trop parfaits pour une institution qui vient de voir le jour. Les lectures de l'histoire ont résolu l’apparition du ksar par l'invasion hilalienne qui aurait contraint les Berbères, après une longue résistance, à quitter la plaine et les oasis pour se replier dans la montagne et les emplacements fortifiés. Là, sur des pitons quasi-imprenables, et tenant solidement les voies de communication, ils se seraient barricadés dans les villages fortifiés qu'ils auraient fait construire [8]. Ibn Khaldoun (1332-1406) nous dit : « les premiers ksour datent probablement des Ier et IIe siècle avant J.-C. Ils constituent sans doute l’extension progressive jusqu'à l’Atlas saharien du phénomène de sédentarisation des nomades berbères. » [9].

La fonction du ksar est essentiellement agricole. À l'origine, c'est un grenier collectif qui sert de lieu d'ensilage des céréales, des olives, des produits de bétail, c'est aussi un lieu sûr où les objets de valeur sont bien en sécurité. Parmi les causes qui nous permettent d’énoncer cette hypothèse de la fonctionnalité du ksar : le fait que la région du sud-ouest algérien et le Sahara en général sont soumis à une aridité climatique aggravée par l’irrégularité pluviométrique qui ne laisse pas de place à une sécurité alimentaire continue et qui fait du ksar un moyen de conservation sécurisé [10].

Les denrées alimentaires sont la richesse qui assure la vie et pourvoit à ses besoins, ce qui exige la présence d’une sorte de chambre forte appelé généralement makhzen, dont la clé revient au chef de famille. Cette institution perpétue la conception patriarcale de la famille et renforce les valeurs de la collectivité ancrée chez les plus âgés. Le ksar ne cédera définitivement son rôle qu'au milieu du XXe siècle sous la pression d'une économie qui rompt avec son caractère pastoral et prend un tout autre contenu qui donne lieu à de nouvelles institutions.

Le mode de vie basé essentiellement sur le semi-nomadisme avait influé sur la fonction principale du ksar. En effet, la double transhumance (en hiver vers le Sahara et en été vers le tel [11]), engendrant une vie active toujours en mouvement, nécessitait un point d’attache permanent vital pour se décharger de tout ce qui n’était pas nécessaire. Il faut ajouter à cela le fait que l’insécurité apportait aux ksouriens une tension permanente, la vigilance était donc de règle. Le ksar demeurait d’un grand secours, pour repousser les razzieurs et éventuellement s’y réfugier en cas de besoin. Ce mode de vie avait un impact manifeste sur la conception, l’organisation spatiale et fonctionnelle du ksar. En effet, à l’entrée, généralement on y rencontrait les ateliers des artisans tels que le forgeron. Ainsi le nomade qui venait s’approvisionner avait souvent quelques choses à réparer, à arranger, un couteau à aiguiser. Les visites s’effectuaient le vendredi en général pour pouvoir concilier les besoins de l’au-delà à ceux d’ici-bas. Cette pratique renforçait les liens et la cohésion entre les sédentaires et les nomades, ils apprenaient ainsi à vivre en groupe et les éléments d’une conscience collective prenaient racine.

Fig. 1 : Jarres enterrées pour conserver des aliments (matmoura) à Béni Ounif (2003)

 

b - Ce que veulent dire l’habitat, l’habitation, et l’habiter

« Chaque société découpe l'espace à sa manière, mais une fois pour toutes ou toujours suivant les mêmes lignes, de façon à constituer un cadre fixe où elle enferme et retrouve ses souvenirs » [12]. Ce sont ces lignes, que nous appelons invariants constitutifs, que nous essaierons de mettre en exergue.

Un seul mot désigne l’espace d’habitation : ad-dār. Avant de signifier « maison », « espace bâti », le mot dār signifie « territoire ». Dār al-`ahd, « territoire du pacte », dār al-harb, « territoire de la guerre », dār al-imān « territoire de la foi », dār al-islām, « territoire de l’Islam », autant de dénominations qui montrent bien qu'avant de désigner une maison, le mot dār désigne un espace délimité et approprié, sur lequel s'exerce l'autorité indiscutée d'un chef ou d'un groupe. C'est donc un espace sur lequel s'exerce un pouvoir dont l'autorité est reconnue. Tandis que l’habiter renvoie à habitus, en terre arabe, d’as-sakan dérive le terme « sérénité », sakîna. Sukûn est le contraire du mouvement. Sakana veut dire « il a perdu de son agitation (harakâtuhu) », ou « s’est calmé après avoir agi ». La principale fonction, donc, de la maison est de procurer le repos et la sérénité, de soustraire l’être à l’agitation et au vacarme environnant.

3 - Évolution de l’habitat traditionnel saharien

Selon les conceptions géographiques de Léon l'Africain, tout le désert situé à l'est du Tafilalt fait partie de la Numidie, qui se trouve ainsi placée au sud de la Berbérie. La distinction que l'auteur établit, pour l'habitat, entre gasbah et villages (ksour) est intéressante mais il n'explique pas le pourquoi de cette différence. Les gasbahs étaient-elles utilisées comme greniers où les ksouriens se réfugiaient en cas de rezzous [13] ou alors, les deux habitats renvoient-ils à deux groupes distincts ? Le rôle joué par le commerce caravanier est bien mis en évidence et l’Atlas Saharien apparaît comme espace intermédiaire entre les commerçants de la Berbèrie et ceux du Bilād al-Sudan, la « Terre des Noirs ».

Les groupes humains se réduisaient à la famille et étaient dispersés autour de leurs jardins. Ces derniers correspondent à la culture en entonnoirs : on déblaie le sable, sur un rayon allant de cinq à dix mètres, jusqu'à ce que l'on atteigne le sol et, à partir de là, on creuse un puits. L'eau n'est en général pas très loin et l'irrigation se fait par le biais du puits à balancier. On cultive donc à l'intérieur de la dépression. Partout, les lignages ont construit en dur un habitat fortifié appelé agham en berbère (pl. ighamawen) et gasba en arabe. Cet habitat fortifié sert de grenier pour la conservation des biens alimentaires (céréales, dattes) et de lieu de refuge en cas d'agression extérieure.

L'autre type d'habitat que l'on rencontre est connu sous le terme de ksar. Dans ce cas, l'espace cultivé (la palmeraie ou jnān) est distinct de l'espace habité. Certains ksour peuvent être considérés comme de véritables cités en raison de la densité de l'habitat et de l'ancienneté de l'installation des lignages qui induisent une tradition dans la gestion des affaires communes et un lien social très fort marqué, entre autres, par une ritualisation très codifiée des échanges et des relations. L'habitat appelé ksar est pourtant relativement récent dans l'histoire de l’Atlas saharien. Auparavant, le lignage s'établissait sur le lieu même où il cultivait ses jardins. Cet habitat ancien était toujours fortifié, du type agham. Ce n'est, selon les traditions recueillies, qu'à partir du XVIe siècle que s'opère la séparation entre espace cultivé et espace habité, par le regroupement des différents lignages éparpillés en un seul lieu purement résidentiel [14]. Sur la base des typologies [15] élaborées par A. G. P. Martin et J. C. Échallier [16], et en nous appuyant sur nos observations, nous proposons la typologie suivante, qui intègre les traces matérielles, ainsi que les éléments fournis par la tradition orale.

Fig. 2 : Axes caravaniers au Maghreb (R. Bellil, Ksour et saints du Gourara, 2003)

L'habitat qui paraît le plus ancien est celui des petites gasbahs édifiées sur des lieux surélevés. Ce type est désigné par les Berbères du nom de tawriht [17]. À l'intérieur et tout au long de la muraille d'enceinte, se trouvent des pièces donnant toutes sur l'espace central sans construction, dans lequel on trouve souvent un puits. Les petites pièces étaient utilisées comme grenier pour entreposer les biens, l'espace central étant réservé au bétail. Nous serions là en présence de petits groupes d’éleveurs semi-nomades.

 

Fig. 3 : Type 1: Tawriht (forteresse sur lieu élevé) Ullazan à Timimoun (2005)

Le second type est formé d’un quartier (agham) édifié souvent en contrebas des collines. À l'intérieur du mur défensif qui entoure la gasbah, l'espace est entièrement recouvert de petites constructions. On observe souvent deux ou trois étages avec des terrasses arrivant au sommet du mur défensif muni d'un chemin de ronde. À l'extérieur de ce mur d’enceinte se trouve le fossé (ahfir) qui l'entoure.

Fig. 4 : Type 2 : agham (quartier) de Aït Sa`id à Timimoun  (R. Bellil)

On observe un troisième type appelé ksar. Il s'agit souvent d'une extension du type que nous venons de voir (type 2 agham). Autour de la gasbah ont été édifiées des habitations serrées les unes contre les autres et entourées d'un mur de protection, qui utilise parfois la façade extérieure des maisons, avec deux ou plusieurs portes. De plus, on observe toujours dans ce type, l'existence d'une mosquée et d'une place (rahba), avec souvent un lieu couvert (asqif), dans lequel on a aménagé des banquettes où se retrouvent les hommes à la fin de la journée. L'asqif se trouve très souvent à proximité de la porte principale. Ce type de ksar est peuplé de deux ou trois lignages et les habitations sont distribuées en quartiers occupés chacun par les membres d'un lignage [18].

Cette évolution de l'habitat s'est effectuée dans le sens de la dispersion vers la concentration. Les anciennes formes d'habitat témoignent de l'éparpillement des groupes humains, alors que le ksar est marqué par le rassemblement de plusieurs lignages en un même lieu.

Fig. 5 : Ksar de Timimoun  (R. Bellil)

 

Fig. 6 : Plan de Charwin à Timimoun  (R. Bellil)

 

4 - Morphologie du ksar

Le ksar est constitué de trois entités distinctes : un espace habité (habitation d’ici-bas, un terroir et un espace de la mort ou habitation de l’au-delà). C’est une occupation agglomérée spécifique, caractérisée par une forme urbaine traditionnelle fortifiée.

Les constructions obéissent à la même architecture, il s’agit d’un ensemble de maisons réparties sur un rez-de-chaussée ou rarement un étage autour d’une cour intérieure. Le ksar se présente ainsi : c’est une forme compacte, de couleur terre, horizontale, directement en relation avec un espace vert, la palmeraie, le terroir. La forme s'organise selon un principe où l'on distingue différentes échelles d'appropriation de l'environnement :

- l'édifice : habitation ou édifice public ;

- l'unité urbaine : association de plusieurs édifices organisés le long d'un axe (zkak) ou autour d'une place (rahba), définissant une unité autonome appropriative par le groupe ;

- la cité (ksar) : l'ensemble des entités en articulations structurées, hiérarchisées, faisant émerger un centre qui identifie l'échelle habitée par la communauté ;

- le territoire : l'ensemble des ksour implantés (généralement) selon des principes morphologiques communs, partageant une succession d'événements signifiants (histoire), définissent, une fois en relation d'échange, un champ d'appropriation pour la population de la région [19] .

Fig. 7 : Ksar de Ghassoul (2003)

Le choix de ces sites est dû le plus souvent au hasard des choses qu’à leur nécessité. Des pérégrinations, des morts subites, des miracles, des errements des hommes et de leurs montures peuvent déterminer le choix d’un site. Certains ksour s'élèvent sur des lieux où un ancêtre est enterré. Les événements religieux majeurs surviennent souvent en des lieux déjà estimés par nature spirituellement puissants. Construire là, c'est se raccrocher à leur pouvoir spirituel et le prolonger grâce à la persistance de l'édifice et aux rituels répétés qui y sont accomplis, répétition qui permet à l'édifice d'unir temps et espace.

Cependant, ce choix est conforté par une représentation préalable de l’espace. Un creux ou une proéminence sont le plus souvent préférés à un terrain plat ; non pas toujours pour des raisons guerrières mais, le plus souvent, au regard d'autres considérations en rapport avec des représentations cosmogoniques. L'accident topographique a, de tous temps, et universellement, été préféré au terrain plat. Le plat est pour le profane et l’accidenté est pour le sacré.

La taille du ksar et l’importance de son espace bâti sont fonction des capacités nourricières du terroir. Quand celui-ci en perd, le ksar est abandonné ; quand, par contre, le terroir est capable de se développer pour recevoir le croît démographique, le ksar se démultiplie. Un autre agham vient alors se juxtaposer au premier et ainsi de suite jusqu’à la limite des possibilités du terroir. À ce moment là, une autre oasis se développe plus loin avec son ksar qui pourrait en appeler d’autres. Les contraintes éco-systémiques constituent donc le véritable facteur limitant à l’agglomération humaine. Une oasis est d’autant plus peuplée que l’eau y est abondante et la nature du sol favorable. Cela explique les chapelets de ksour du Gourara longeant les oasis.

Fig. 8 : Les sites habités de Timimoun (R. Bellil)

 

Fig. 9 : Les ksour du Gourara  (R. Bellil)

Le ksar se trouve toujours en aval sur le cheminement hydraulique. Pour des raisons évidentes d’ « économie des eaux », la partie habitat du ksar se situe toujours en amont du terroir, permettant ainsi à l’eau de servir d’abord aux besoins domestiques avant d’atteindre la zone de culture [20].

Le ksar est entouré, en général, d’un sûr (rempart). Parmi les principales caractéristiques des ksour se trouvent les fortifications. Loin d’être un indice militaire, les murailles peuvent découler d’une mentalité collective où l’ordre est symbolisé par la limite matérialisée. Les enceintes des ksour peuvent constituer des frontières délimitant le monde organisé par rapport à celui chaotique [21]. Il est certain que beaucoup d’histoires se sont fondées sur l’aspect militaire dû à la présence des remparts. Ces établissements humains sont loin d’avoir une fonction défensive uniquement. La présence des niches disposées en enclos n’en fait pas d’emblée des établissements propices à la défense.

Fig. 10 : Agham de Aït `Isa  (R. Bellil)

 

Fig. 11: Es-sûr (remparts) de Boussemghoun (2004)

Le conseil des anciens du village se trouve être à l'origine de toutes les institutions de gouvernement, de droit, de justice et moralité publique. L'importance de l'institution se mesure au fait qu'elle apparaît aussi bien dans la mythologie religieuse que dans l'administration temporelle de la cité. Chaque ksar possédait un conseil des anciens, la djma`a. Le lieu de réunion est une sorte de place équipée de banquettes en pierre et ponctuée par des édifices de commerce et de production. Cette institution coutumière des conseils qui se constituaient spontanément au sein du groupe, était chargée non pas d'édicter des règlements nouveaux mais d'assurer selon le consentement général l'application de règles remontant au passé le plus lointain. Dans une culture de tradition orale, seuls les hommes d'âge avancé se sont trouvés à même d'assimiler l'ensemble des connaissances utiles. De nos jours encore, les hommes âgés jouissent d'une influence.

Fig. 12 : Place de djmâ`a (conseil des anciens) à Boussemghoun (2003)

 

Fig. 13 : Place de djma’a à Béni Abbés (J. Bachminski et D. Grandet, 1985, pp. 34)

La porte dans le ksar est l'image emblématique de cette double fonction de communication et de protection assurée par l'enceinte. Elle est aussi un lieu de réunion ou de résidence, par la présence de salles souvent vastes aménagées de part et d'autre de l'accès. Cette exaltation de l'enceinte et des portes ne doit pas pour autant conduire à une vision rigide de l'espace urbain constituant une sorte de monde clos auréolé d'irénisme. Les portes sont au moins au nombre de deux, l’une gablî (ouverte au sud), et l’autre shargî (ouverte à l’est). Elles sont souvent « gardées » par des sépultures d’awliya (saints)  [22].

Une porte (souvent en chicane), percée dans les remparts, ouvre dans une rue centrale (darb) sur laquelle prennent des rues secondaires et enfin des petites venelles (zqāq) qui finissent en impasse menant aux différentes habitations. Réduites au minimum, ces rues servent uniquement de voies de passage. Ce sont de longs corridors recouverts avec, de temps en temps, des parties dégagées qui laissent filtrer la lumière du jour qui permet de s’orienter. Elles aboutissent à des portes donnant sur une chicane, sqîfa, précédant le patio proprement dit [23].

Fig. 14 : Bāb –l-Gabli (entrée principale) de Boussemghoun (2003)

 

Fig. 15 : Darb (rue centrale) Ikhrazam à Boussemghoun (2003)

 

Fig. 16 : Zqāq (venelle) de Boussemghoun (2003)

 

Fig. 17 : Darb aménagé par des dkakan (banquette) à Taghit (2003)


Fig. 18 : Darb ponctué par un trou d’éclairage à Taghit (2003)

 

5- L’architecture ksourienne

Le ksar a une forme compacte, de couleur terre, horizontale, directement en relation avec un espace vert, la palmeraie. C'est l'horizontalité qui est la règle dans ce type d'établissement. Les maisons n’étant que les tombeaux d'ici-bas, l'horizontalité est la forme qui récuse la fatuité et l'orgueil. Ce qui est couché et aplati renvoie à l'humilité et à la soumission. La verticalité est une exception réservée aux édifices exceptionnels (qubba, minaret). Sa symbolique renvoie au sublime.

L’architecture ksourienne est le produit d'une culture de masse nourrie de la quotidienneté, de l'environnement et du génie local et non pas une production d'élite. Cet habitat exprime les contraintes environnementales et les valeurs civilisationnelles locales. Car raisonner, exclusivement, en termes d'écosystèmes et de contraintes environnementales, c'est succomber à la séduction du discours rationnel qui sépare le corps et l'esprit en deux entités distinctes [24].

Fig. 19 : L’horizontalité et la compacité des constructions à Taghit (2003)

Les maisons obéissent au même plan, à savoir une cour intérieure toujours carrée, accessible par une chicane d’une ruelle. Cette cour est en plus très fonctionnelle. Elle peut, selon les circonstances, faire fonction d'étable pour les animaux ou de lieu de dépôt provisoire. Autour de la cour sont disposés les byût (les pièces). Ces pièces adjacentes étalées en rez-de-chaussée, rarement en étage, sont éclairées et aérées par l’intermédiaire de cette cour.

La byût (pluriel bayt) est la cellule de base, généralement allongée de 4 mètres de profondeur et d’environ 2 mètres en hauteur et en largeur ; la juxtaposition de ces byût et leur superposition donne l’impression, depuis l’extérieur, d’une muraille élevée, sans ouverture, compacte, analogue aux remparts d’un établissement fortifié..L’une de ces byût fait office de cuisine. Elle était généralement sans toit pour permettre l’évacuation des fumées résultant du feu de bois servant à la cuisson.

Fig. 20 : Maison dans le ksar de Taghit (J. Bachminski et D. Grandet, 1985, p. 23)
Légende : 1 : Sqifa, 2 : Patio, 3 : Étable, 4 : Cuisine, 5 : Dépôt, 6 : Trémie des latrines d’étage, 7 : Terrasse, 8 : Séjour, 9 : Bayt, 10 et 11 : Dépôts

 

Fig. 21 : Bayt (cellules de base) au ksar de Kerzaz (2005)

 

Fig. 22 : Maison à quatre piliers au ksar de Kenadsa (J. Bachminski et D. Grandet, 1985)

 

Fig. 23 : Maison à deux piliers au ksar de Kenadsa (J. Bachminski et D. Grandet, 1985)

L’espace intérieur de la maison est découpé selon une conception du sacré et non pas seulement en fonction de besoins concrets et objectivables : en général, deux chambres, une cour intérieure (rahba), un petit magasin à provisions et un petit enclos pour les animaux (taghemmin). Ce petit enclos est d'une importance capitale, en tant que premier broyeur des déchets ménagers. Tout déchet domestique se transforme immédiatement en aliment de bétail dont les déjections sont recyclées en un engrais assez recherché. Ce fumier, mélangé aux cendres du foyer (kanûn), sert à bonifier l'ajdal, ce jardin que chaque maison possède. Compte tenu de sa qualité, ce fumier fait souvent l'objet d'une clause spéciale. Le propriétaire d'une maison, avant de la louer, exige du futur locataire, comme condition préalable, la récupération du fumier (laghbâr) aussi bien humain qu'animal.

Le symbolisme animal est des plus foisonnants et chaque espèce possède une histoire qui mérite un long développement. Nous ne traiterons ici que du symbolisme animal dans sa globalité. Si la cynégétique, l'hippologie et l'ichtyologie sont des disciplines pratiquées depuis longtemps, le Coran et la tradition ont apporté avec eux une nouvelle organisation du bestiaire préislamique et donné naissance à toute une zoologie sacrée. Rappelons seulement, en préambule, que les animaux domestiques sont protégés par les Musulmans, en raison de l'aide ou du réconfort qu'ils leurs apportent. En outre, une légende islamique prévient qu'ils témoigneront contre leurs maîtres lorsque, au jour du Jugement dernier, ceux-ci comparaîtront devant leurs juges. Le Prophète aurait vu en songe une femme avenante qui, pour avoir laissé son chat mourir de faim, avait été furieusement égratignée par lui dans la tombe [25]. On prête à Al-Kisaï (VIIe siècle) d'avoir entendu l'Envoyé de Dieu dire que les animaux furent privés de la parole par Allah le jour où ils désobéirent à Adam qui leur demandait de labourer la terre [26]. L'autre explication de la présence du bétail dans les maisons est liée aux croyances qui font que les animaux peuvent constituer un rempart contre le néfaste. La croyance veut que les ovins et les caprins qui cohabitent dans le même espace que l’homme, à l’intérieur de la maison, soient des écrans contre le danger. Ceci est à relier au sacrifice qui consiste à tuer un mouton ou un autre animal, à faire couler le sang pour éviter une catastrophe que l'on sent imminente ou pour évacuer un mal déjà là.

Un autre élément très important et même structurant de la maison ksourienne est le patio ou wast dār. C’est autour de cet élément que s’organise la maison. Chaque face s’ouvre sur un espace appelé bayt. Quand des contraintes techniques empêchent une de ces ouvertures, sur un côté mitoyen à une autre maison ou donnant sur l'extérieur, l'ouverture est simulée. Une porte aveugle [27] est dessinée à même le mur, bien marquée par un arc et ses décors.

Fig. 24 : Wast Dār d’el Qadi, à Boukaïs, dans la wilaya de Béchar (2005)

 

Fig. 25 : Dār bû Hasûn, cheikh Zāwiya Kerzaziya, à Kerzaz (2005)

 

Fig. 26 : Arcature au niveau d’un zqāq à Ghardaïa indiquant le changement de la qualité de l’espace public (2005)

Les portes, seuils et ouvertures marquent la transition entre deux sortes d'espace. Leur franchissement peut indiquer le passage d'une personne d'un état à l'autre. Portes et fenêtres, ouvertures indispensables sont aussi les parties les plus vulnérables d'un édifice. La porte invite à l'entrée et en permet le contrôle. Les portes sont les expressions les plus élaborées et les plus explicites du contrôle. Elles reflètent ou proclament l'importance du contenu de l'édifice.

Chez les Berbères, la porte doit rester ouverte toute la journée pour qu'entre la lumière du soleil, apportant la prospérité. Une porte fermée signifie la stérilité ; s’asseoir sur le seuil, c’est empêcher le soleil de rentrer, c'est barrer l'entrée du bonheur et de la fertilité. La porte acquiert souvent une importance marquée par des arcs, piliers, portiques et autres éléments. Ces arcs [28] si diversement décorés sont là pour marquer des passages. Que ce soit à l'entrée du ksar ou dans une rue, la porte est bien soulignée par cette arcature.

L’arc le plus usité au Maghreb est l’arc plein cintre outrepassé ou en fer à cheval, qui symbolise la défense et la protection magiques. Il est censé éloigner le mauvais œil, la malédiction et les mauvais augures. Il « déleste » les visiteurs de leurs intentions envieuses, leur aura négative. Il est en outre l’un des emblèmes porte-bonheur que semble avoir la culture maghrébine.

Si l'arc, symbole de majesté, marque tous les passages, c'est que la porte possède un sens symbolique. Plus qu'un accès, c'est une limite. À la fois permissive et obstruante, la porte est l'expression d'une ambivalence du possible et de l'impossible [29].

Fig. 27 : Traitement de la porte d’entrée d’une maison mozabite à Ghardaïa (2005)

La porte est souvent prolongée d'une sqîfa, sorte de vestibule où parfois est confectionnée une banquette maçonnée (dukkâna) permettant au seuil d'être marqué dans sa fonction de filtre. Contrairement à ce que l'on a pu penser ou écrire, cette sqîfa n'est pas un espace où le propriétaire recevait ses clients [30]. Elle révèle plutôt la structuration polynucléaire de la famille. Plusieurs ménages habitaient la même demeure. Frères et cousins vivent sous le même toit et sous la même autorité patriarcale. Mariés et occupants des pièces (byût) différentes, les couples ne se rencontrent jamais tous ensemble dans le même espace. Chaque homme évite, en général, de croiser le regard d'une femme qui n'est pas la « sienne ». On n'y pénètre pas de manière impromptue, même quand on y habite. On s'annonce (par l'expression : at-trîg! le chemin !) et patiente quelque peu dans la sqîfa. On peut même s'y reposer éventuellement, notamment quand on est accompagné d'un invité, étranger à la famille, le temps que le chemin soit dégagé.

Fig. 28 : Sqîfa dans une maison à Kerzaz (2005)

Avant d’entamer la sqîfa, un lieu de sens, l’atba (le seuil) la devance, servant à marquer le changement d'espace, mais également de statut. En revanche, le seuil peut signifier le contrat que l'on passe avec les forces de l'Invisible, également appelées Ahl-ad-Dār (litt, « Les Occupants de la Maison »). Pour Ed. Westermarck, en franchissant le seuil, la personne éprouve un certain pressentiment. Ainsi s'explique le symbolisme du franchissement de la limite qui sépare la lumière de l'obscurité et qui requiert quelques défenses magiques comme la tasmiya (le fait de dire Bismillah, « Au nom de Dieu »). [31].

Les seuils sont souvent des barrières symboliques de ces ouvertures et peuvent être marqués par des prières, des incantations et des bénédictions pour s’assurer qu’une arrivée est bienveillante et protéger l'espace intérieur. La marche du seuil arabe de la porte de devant est aussi l'endroit où est posé un instant le corps d'un défunt quittant la maison pour la dernière fois.

Fig. 29 : `Atba-t dar (seuil de la maison) au ksar de Kerzaz (2005)

 

Fig. 30 : `Atba-t el mayat (seuil du mort) au ksar de Kerzaz (2005)

Un élément architectonique attirant notre curiosité est le trou au niveau de la toiture appelé `ayn ad-dār, littéralement traduit « l’œil de la maison ». Cette ouverture aménagée au plafond des patios est, en effet, un « œil de la maison » qui regarde le ciel, symbole de la grâce et de la protection. Elle permet l’infiltration de la lumière, qui est la métaphore la plus fondamentale du Coran, lequel dit : « Dieu est la lumière du ciel et de la terre ». Codés dans les dessins abstraits de l'architecture musulmane, des motifs représentent des sources de lumière spirituelle (étoiles, lampes, rayons), souvent entrelacés avec des versets du Coran et placés aux portes et aux fenêtres.

Fig. 31 : Ayn-ad-dâr (« œil de la maison » à Taghit (2003)

Pour les matériaux de construction le ksourien a fait appel à son milieu. L’utilisation des matériaux dits « hors normes », extrêmement limités dans des sociétés de pénurie, est exclusivement réservée aux édifices hors normes (relevant du sacré). L'extraordinaire, le non-utilitaire sont réservés aux édifices cultuels. Les plus anciennes constructions ont été édifiées en pierres [32]. L’argile comme matériau de construction n’intervient que par la suite. On peut évidemment penser à une raréfaction du matériau qui va pousser à l’utilisation d’un matériau moins solide. On peut également penser à une « pacification » qui rend superflue une protection. Ces hypothèses ne résistent pas à un examen sérieux.

De manière générale, l'habitation est en tûb avec une structure en murs porteurs, assez épais. La poutraison est faite de troncs de palmiers (khashba) et les plafonds sont constitués par un clayonnage de palmes (jrîd). La terrasse est faite d’un mortier de terre où se mêlent argile et feuilles de palmiers. Les troncs d’arbre constituent les poutres, ce qui explique la largeur à peu près commune à toutes les pièces (2 mètres 50 environ). La différence réside dans la longueur qui, elle, dépend d’aspects sociaux. Quand l’importance de la fonction de la pièce nécessite une plus importante largeur, on recourt à la construction de piliers et surtout de voûtes.

Fig. 32 : Construction en pierre à Kenadsa (2004)
C'est un mur rempart qui nous fait face. Mais loin de dégager un effet statique et rigide, l'appareillage des petites pierres sèches avec des assises intercalées en pose horizontale et en pose en biais donne au mur une vibration qui dégage un effet de mouvement et de vie.

 

Fig. 33 : Support de plancher d’une chambre, à Roufi, dans les Aurès (J. Bachminski et D. Grandet, 1985, p. 7)

 

Les troncs sont taillés en deux, les demi-cylindre ainsi obtenus sont juxtaposés les uns aux autres et couverts d’un revêtement de pierraille mélangée au mortier à base d’argile. La région des monts des ksour a connu un autre type de toiture analogue au précédent, où le tronc de palmier est remplacé par des troncs d’olivier ou d’arars.

Fig. 34 : Technique d’agrandissement d’une chambre par piliers surmontés d'un arc (J. Bachminski et D. Grandet, 1985, p. 7)

 

Fig. 35 : Gaines de palmier juxtaposées à Taghit (2003)

 

Fig. 36 : Lattis serré de tiges de roseau à Boussemghoun (2003)

La décoration s’inscrit dans une ornementation géométrique. C’est un art que les Berbères ont de tout temps pratiqué. Des compositions cruciformes, des carrés, des losanges et des polygones étoilés ont été réutilisés dans les décors architecturaux du ksar. Ces symboles ont été si fortement réappropriés par le génie de l'art musulman qu'ils finissent par changer de sens aux yeux mêmes de ceux dont les ancêtres en furent les promoteurs.

Les décorations se font au niveau du matériau lui-même. Les toitures sont faites à partir d'un clayonnage des branches de palmiers (jrîd). Elles sont d'une composition géométrique. La disposition des pierres est en arête de poisson, de corniches saillantes [33].

Fig. 37 : Tapis du Djebel Ammour à Laghouat (2003)

 

Fig. 38 : Décoration du plafond en osier à Boussemghoun (2002)

Dans la culture de pareille société le beau et le précieux sont continuellement exposés à l'envie destructrice. Cela explique partiellement l'aspect introverti de l'ornementation. L'ostentation est plus évitée que rejetée car elle attire les regards qui « vident les maisons et remplissent les tombeaux », pense la sagesse populaire. Ce qui ne manquera pas de commander un certain nombre de moyens prophylactiques préventifs. Parmi les plus usités, on retrouve le miroir et le chiffre cinq, souvent représenté par la khâmsa. La main dessinée sur la façade des maisons ou sur tout autre lieu en vue de le protéger contre la jettatura [34]. Khums signifie « cinq », « pentacle » en relation avec les cinq doigts. Le symbolisme du chiffre cinq est sans doute le mieux partagé par tous les Musulmans. Sa valeur prophylactique est ainsi reconnue à travers le territoire de l'Islam, qu'il soit arabo-berbère, perse, turc, indo-malais ou africain. C'est un chiffre bénéfique et faste : on compte cinq prières quotidiennes, cinq chapitres importants du pèlerinage (haj), cinq types de jeûnes, cinq dispenses pour la prière du vendredi, cinq générations pour la vengeance tribale, cinq biens de la dîme (zakāt), cinq doigts talismaniques. Le monde du symbole consacre donc le chiffre cinq comme l'une des clés des offices occultes ou magiques ; il en est la preuve matérielle, sonore et gestuelle tout au moins. Ses connexions relèvent tout à la fois des mondes de la magie, de la sorcellerie. « Cinq », note Louis Massignon, « est en Islam le nombre des cinq chameaux pour la diya, les cinq takbir pour les morts shî'ites ; ce sont les cinq témoins de la Mubāhala, les cinq clés coraniques du mystère (VI, 59 ; XXXI, 34) et les cinq doigts de la "main de Fâtima". »  [35]

Fig. 39 : Khumsa (main dessinée) dans une maison de Haouita à Laghouat (2005)

Quant au miroir, la légende populaire maghrébine lui attribue forces occultes dangereuses et inquiétantes. Aussi la conviction générale le revêt-elle d'une suspicion qui confirme l'attitude du dogme musulman à son égard : un miroir brisé apporte son lot de malheurs et de souffrances à la maison où il a été brisé. Sur le plan de la subjectivité personnelle, le miroir est la surface sur laquelle se révèle l'intérieur de l'âme : il est l'objet de l'introspection. Le miroir est maléfique la nuit : une femme mariée peut précipiter l'arrivée d'une coépouse ; une femme enceinte se mirant de nuit dans un miroir risque d'enfanter une fille ou un enfant malformé. Le miroir joue un rôle déterminant dans la médiation avec la divinité créatrice : c'est ainsi que le voient les Ikhwān dans leurs Épîtres (Rassāil,) lorsqu'ils évoquent le miroir rouillé de l'âme qui n'arrive plus à refléter l'image du Créateur. Cette idée aurait été reprise par Ghazali (1058-1111) et par Ibn Toufaïl (mort en 1185) [36]. Le sens mystique du miroir est en fait celui de la connaissance initiatique, une sorte de matrice où vient se refléter le degré d'avancement de l'impétrant; il est symbole de la connaissance de soi : « On peut dire du miroir que symbole même du symbolisme, il est le révélateur des correspondances, de ce qui permet de passer d'un plan à l'autre »  [37] .

Conclusion

Tout au long de ce travail nous avons essayé de montrer qu'il existe plusieurs logiques de fondation d’un établissement humain ancien. Les plus déterminantes demeurent celles qui relèvent de ce que nous avons appelé « le sacré ». Les logiques technologiques et écosystémiques nous paraissaient, pour le moins, secondaires, souvent nourries par des a priori ou simplement relevant de la rationalisation a posteriori. Les travaux de recherche ont interrogé l’espace ksourien, dans leur majorité, selon une vision fonctionnaliste qui considère le bâti comme une réponse fonctionnelle à des données objectivables. Cette vision est insuffisante et est inapte à expliquer pourquoi certains éléments disparaissent alors que d'autres subsistent longtemps après la disparition de la nécessité.

L'environnement bâti de l'homme n'a jamais été et n’est toujours pas commandé par les spécialistes (architecte, urbaniste, etc.). Cet environnement était le résultat d'une architecture populaire. L’architecture ksourienne fait partie de cette architecture populaire. En effet, l'habitat qui paraît le plus ancien est celui des petites forteresses édifiées dans des lieux surélevés. Ce type est désigné par les Berbère du nom de tawriht. Le second type est formé de forteresses (agham) édifiées souvent en contrebas des collines. On observe un troisième type appelé ksar. Il s'agit souvent de l’extension d’agham. Le ksar est de taille plus importante, plusieurs lignages d'origine et de statuts différents y cohabitent.

Le ksar est entouré en général d’un sûr (rempart). Ces fortifications constituent l’une des principales caractéristiques du ksar et de ses différentes composantes. Elles assurent la protection et la défense de l’espace habité d’ici bas et, en même temps, invitent à distinguer l’espace sacré de l’espace profane et ce pour mieux et toujours s’imprégner du monde sacralisé afin de ne pas se laisser prendre par les tentations du profane. Ce n'était pas la présence des remparts, mais leur signification religieuse qui allait faire du ksar un creuset où se coordonneraient les activités et se modèlerait l'âme de ses habitants. Il procurait ainsi à ses habitants, particulièrement grâce au tracé d'une enceinte sacrée, la vie communautaire et recluse nécessaire au futur progrès de l'humanité.

L’horizontalité (anbisāt) relève d'une symbolique statique de soumission. Elle est celle des animaux et des végétaux. Elle reste la règle dominante dans l’édification du profane des ksour. Les maisons ne sont que les tombeaux d'ici-bas. L'horizontalité détrône l’autosatisfaction et l'orgueil, elle renvoie plutôt à l'humilité et à la soumission. Quant à la verticalité (antisāb), elle relève d'une symbolique noble en raison de l'évocation de la transcendance liée à la position de Dieu par rapport à sa Créature. C’est l’expression même du sacré. Elle est réservée aux édifices exceptionnels : qubba, minaret, etc. Sa symbolique renvoie au sublime.

Le choix de ces sites est dû plus souvent au hasard des choses qu’à leur nécessité. Des pérégrinations, des morts subites, des miracles, des errements des hommes et de leurs montures peuvent déterminer le choix d’un site. Cependant, ce choix est conforté par une représentation préalable de l’espace. Un creux ou une proéminence sont le plus souvent préférés à un terrain plat ; non pas toujours pour des raisons guerrières mais, le plus souvent, au regard d'autres considérations en rapport avec des représentations cosmogoniques. L'accident topographique a, de tous temps, et universellement, été préféré au terrain plat. Ce plat est pour le profane, l’accidenté est pour le sacré. Les contraintes écosystémiques constituent donc le véritable facteur limitant à l’agglomération humaine. Une oasis est d’autant plus peuplée que l’eau y est abondante et la nature du sol favorable.

On doit adopter une position « non-physique » en ce qui concerne les formes de l’habitation puisque le chant, la danse et les rites étaient plus évolués que les outils. L. Mumford pose en principe la primauté du symbole, la primauté de la fonction poétique et mythique des symboles sur leur utilisation rationnelle ou pratique. La primauté de l’ordre moral sur l'ordre technique. Dans la plupart des cas, ce qui distingue les peuples les uns des autres n'est pas leur vie matérielle, mais leur vie rituelle, et ceci se reflète inévitablement dans les formes de leurs établissements.

Il existe plusieurs logiques d’organisation de « l’espace ksourien ». Les plus déterminantes demeurent celles qui relèvent de ce que nous avons appelé « le mythico-rituel ». Les logiques technologiques et rationnelles restent secondaires. Il nous paraît pertinent aujourd’hui de cesser de ne voir dans les ksour qu’une « architecture de spontanéité » sans règle ni modèle. Un autre regard s’impose, où « tradition » ne rime pas forcement avec « archaïsme » ou « arriération ». Ces établissements humains que nous voyons comme le produit d'une spontanéité se révèlent être, en fait, le produit d'une planification rigoureuse et autrement plus complexe que la planification actuelle, en ce sens où elle a pris en considération non seulement le rationnel mais encore et surtout l’irrationnel : le spirituel.

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 ANNEXE

Les systèmes de translittération de l'alphabet arabe en lettres latines ont été mis au point essentiellement sur la base d’un référent qui est la langue arabe dite classique. Au Maghreb, certaines spécificités notamment au niveau phonétique apparaissent dans les différents dialectes,  lesquels de surcroît reposent sur l’oral et n’ont pratiquement pas d’assises écrites. C’est pourquoi, il nous est paru nécessaire d’adjoindre à la translittération conventionnelle proposée par l’Encyclopédie de l’islam [38] (voir tableau ci après) la précision suivante : en ce qui concerne les noms des villes, village, des lieux-dits et autres établissements humains, nous avons opté pour la transcription en usage en langue française.

Consonnes

Voyelles longues

ء

a

ض

đ

ى

ā

ب

b

ط

ţ

و

û

ة

t

ظ

ď

ي

ï

ث

th

ع

Voyelles courtes

ج

dj

غ

ķ

ـ

a

ح

h

ف

f

ـ

u

خ

kh

ق

q

ـ

i

د

d

ك

k

Diphtongues

ذ

dh

ل

l

و

aw

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م

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ay

ز

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n

Articles

س

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NOTES

[1] BACHELARD G.,  La poétique de l'espace, Paris, PUF, Quadrige (1re édit. 1957).

[2] DEFFONTAINES P., Géographie et religion, Paris, Gallimard, 1948, p. 100.

[3] HEIDEGGER M., Être et temps, trad. par François Vezin, Paris, Gallimard, 1986.

[4] RAPOPORT A, Pour une anthropologie de la maison, Paris, Dunod, 1972, 208 p..

[5] MUMFORD. L., La cité à travers l’histoire, Paris, Seuil, 1961, 781 p..

[6] DUPLAY C. et M., Méthode illustrée de création architecturale, Paris, Éditions du Moniteur, 1985.

[7] Voir MOUSAOUI A., Logiques du sacré et modes d’organisation du sacré de l’espace dans le sud-ouest algérien, thèse de doctorat, 1994, 370 p.

[8] ZAÏED A., Le Monde des ksour du Sud-est tunisien, Tunis, Beït al Hikma, 1992, p. 32.

[9] IBN KHALDOUN, Histoire des Berbères et des dynasties maghrébines, Berti édition, Alger, p. 178.

[10] CAPOT REY R., « Greniers domestiques et greniers fortifiés au Sahara : le cas du Gourara », in Travaux de l’IRS, t. XIV, 1956, pp. 139-159.

[11] Les plaines du Nord.

[12] HALBWACHS M., La mémoire collective, Paris, PUF, 1968, p. 166.

[13] Il fait partie du dialecte local et c’est le pluriel de « razzia ».

[14] BELLIL. R, « Récits du Gourara », in Insaniyat, N° 12, décembre 2000, pp. 77-100.

[15] MARTIN A. G. P., Les oasis sahariennes (Gourara - Touat - Tidikelt), Paris, Challamel,  1908, pp. 25-29

[16] ÉCHALLIER J. C., « Forteresses berbères du Gourara. Problèmes et résultats de fouilles  », in Libyca, t. XXI, 1973, pp. 293-302.

[17] BENABOU M., Une oasis du Sahara occidental (Timimoun), thèse de 3e cycle, EPHE IVe section, Paris, 1972, p. 173.

[18] BELLIL R., Ksour et saints du Gourara dans la tradition orale, l’hagiographie et les chroniques orales, Mémoires du Centre national de recherches préhistoriques, anthropologiques et historiques, Alger, No 3, 2003, p. 345.

[19] MOUSAOUI. A, Logiques du sacré et modes d’organisation du sacré de l’espace dans le sud-ouest algérien, thèse de doctorat, 1994, p. 67.

[20] BASSET R., « Les ksour berbérophones du Gourara », in Revue africaine, t. LXXXI, n° 3 et 4, 1937.

[21] ÉLIADE M., Traité d’histoire des religions, Paris, Plon, 1994, p. 135.

[22] Le signifiant walî (pluriel awliyā), équivalent au terme français « saint », est souvent associé à Allâh ou Şalih, pour constituer des groupes lexicaux walî allâhet walî Şalih. Le nom propre du walî est toujours précédé par Sîd ou Sîdna,  l’équivalent de Seigneur ou plus exactement de Maître, preuve par le locuteur de sa vénération et sa soumission au saint homme. Ce signifiant est usité pour signifier « l’Homme Saint », le personnage par rapport auquel se définit une, voire plusieurs communautés. Ce personnage doit réunir nombre de qualités : c’est un homme pieux, à qui on reconnaît un rapport relationnel spécial avec le créateur Dieu et avec l’au-delà. C’est la force protectrice de la communauté qui lui est rattachée, c’est leur source spirituelle et leur guide.

[23] BADUEL P. R., « Habitat traditionnel et polarités structurales dans l’aire arabo-musulmane », in Annuaire de l’Afrique du Nord, CNRS, t. XXV, pp. 231-256.

[24] ÉCHALLIER J.-C., « Sur quelques détails d’architecture du Sahara », in Le saharien, n° 42 et 44, Paris, 1966-67.

[25] DERMENGHEM E., Le culte des saints dans l’islam maghrébin, Paris, Gallimard, 1954, 2e éd., 1982, p. 99.

[26] SIDERSKY D., Les origines des légendes musulmanes dans le Coran et dans la vie du Prophète, Paris, Geuthner, p. 45.

[27] L’appellation locale est at-tâqa al-`amya, « fenêtre aveugle ».

[28] L’arc (qaoûs, pl. aqouâs) est introduit sur Terre par l'ange Gabriel (voir COOMARASWAMY A.K., « Le symbolisme de l’épée », in Études traditionnelles, Paris, janvier 1938, p. 129.). C'est grâce à lui qu'Adam en apprend le maniement. Symbole paradisiaque : le prophète Mohamed aurait dit : « Apprenez à tirer à l'arc, car l'espace compris entre les deux bouts est l'un des jardins du Paradis. »

[29] ÉCHALLIER J.-C., Essai sur l’habitat sédentaire traditionnel au Sahara algérien, Paris, IUP, 1968, p. 129.

[30] BACHMINSKI J. et GRANDET D., Éléments d'architecture et d'urbanisme traditionnels, Université des sciences et de la technologie d’Oran, 1985, 84 p.

[31] WESTERMARCK Ed., Les cérémonies du mariage au Maroc, Paris, Leroux, 2003, p. 28.

[32] ÉCHALLIER J. C., « Forteresses berbères du Gourara. Problèmes et résultats de fouilles », in Libyca, t. XXI, 1973, pp. 293-302.

[33] JACQUES-MEUNIÉ D., Architectures et habitats du Dadès (Maroc présaharien), Paris, Librairie C. Klincksieck, 1962, p. 46.

[34] RAY J., « Khamsa et croix. Le cinq et son rôle protecteur dans le sud marocain », in L’Afrique française, N° 47, 1937, pp. 572-574.

[35] MASSIGNON L., Essai sur les origines du lexique technique de la mystique musulmane, Paris, J. Vrin, 1968, p. 163.

[36] MARQUET Y., La philosophie des Ikhwan al-Safa, Alger, SNED, 1975, pp. 349-350.

[37] MEYEROVITCH E. de V., Mystique et poésie en Islam, Paris, Maisonneuve, 1982, p. 123.

[38] ENCYCLOPÉDIE DE L’ISLAM, Paris, Leyde, 2e édition, 1960, 7 vol. parus (1re édition. 1934, 4 vol.)


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© Mustapha Ameur Djeradi - CERAV

Référence à citer / To be referenced as :

Mustapha Ameur Djeradi

L’architecture ksourienne (Algérie) entre signes et signifiants (The architecture of ksour (Algeria) between signs and signifiers)

L'architecture vernaculaire, tome 36-37 (2012-2013)

http://www.pierreseche.com/AV_2012_ameur_djeradi.htm

26 septembre 2012

L’auteur :

Après avoir travaillé dans des bureaux d'études d’architecture et été fonctionnaire au sein de la direction de l'urbanisme de la wilaya d'Oran, Mustapha Ameur Djeradi à rejoint l’université. Il termine un doctorat d'État à l'université des sciences et de la technologie Mohamed Boudiaf à Oran (Algérie) : Espaces de la mort et (re)fondation des cités. Interrelation entre les espaces habités d'ici bas et de l'au-delà dans les monts des ksour.

djeradimusameur[at]yahoo.fr

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