BARRE À MINE DÉCOUVERTE AU BOIS DE LIRATE À VALS-PRÈS-LE-PUY (HAUTE-LOIRE) Digging bar discovered at the place called Bois de Lirate at Vals-près-le-Puy, Haute-Loire Christian Lassure (texte), Gérald Pinault (photo et dessin)
Cette barre à mine (1) en fer forgé a été trouvée par M. Gérald Pinault lors de l'aménagement d'une parcelle qu'il possède au lieu dit Bois de Lirate à Vals-près-le-Puy en Haute-Loire.
Un dessin coté que notre correspondant a bien voulu nous fournir permet de se faire une idée d'un outil qui a peut-être servi à extraire des blocs de basalte d'une coulée voisine. On remarque tout d'abord que la section de la barre est non pas circulaire ou octogonale (comme c'est généralement le cas pour les barres à mine du commerce) mais carrée et qu'elle varie en épaisseur d'une extrémité à l'autre. On note ensuite que son extrémité haute est plate (pour permettre la percussion) et que son extrémité basse est en forme de pointe très émoussée (signe d'un usage intensif ou prolongé).
Sur deux faces opposées, le profil est d'abord rectiligne et régulier sur environ 40 cm puis s'enfle sur une dizaine de cm avant de s'effiler jusqu'à la pointe 1 m 03 plus bas. Le profil des deux autres faces opposées est, quant à lui, dissymétrique : un bord est parfaitement rectiligne tandis que l'autre, d'abord aplati sur une dizaine de cm, s'enflle en deux paliers successifs sur une cinquantaine de cm avant de redescendre progressivement jusqu'à la pointe (voir le dessin, qui en dit bien plus long...). La longueur de la barre - 1 m 03 - postule le système métrique (2). Elle n'est donc pas très ancienne : XXe siècle au plus tard, 2e moitié du XIXe siècle au plus tôt. Il se peut que ce soit une barre à mine forgée à la demande par un artisan local. Il est difficile d'en dire plus. NOTES (1) Au sens premier, une mine est une excavation pratiquée sous un ouvrage pour y fourrer une charge explosive. Par métonymie, c'est aussi cette même charge. L'outil communément appelé « barre à mine » mérite donc doublement son nom : il sert à creuser des mines (des cavités) pour y mettre des mines (des charges). Mais forer des trous n'est pas la seule utilité de la barre à mine : celle-ci peut servir, par exemple, à décoller des plaques d'ardoise dans une carrière, à déchausser les pierres d'une maçonnerie, à déplacer des blocs de pierre; son rôle est alors celui d'un levier. Certains tracéologues font remonter la barre à mine à la Préhistoire, voyant en elle l'outil qui aurait servi à creuser les puits à silex néolithiques de Flins-sur-Seine dans les Yvelines. Il faut préciser cependant, pour éviter tout anachronisme (le fer et a fortiori la poudre étant encore dans les limbes à l'époque), qu'il ne peut s'agir que de barres en bois dur (érable, buis). Pour trouver des barres en fer, il faut attendre l'Age du fer (évidemment). On en aurait trouvé trace dans les vestiges d'habitations gauloises de la Tène III (2e moitié du 2e siècle - 1er siècle avant J.C.) situées au Puy d'Issolud dans le Lot (Jean-Pierre Girault, Fouilles archéologiques au Puy-d'Issolud (Fontaine de Loulié), dans BSEL, 3e fasc. 1998, juillet-septembre, t. CXIX). Cet optimisme doit être tempéré : l'Age du fer n'est pas l'Age de l'acier, le seul matériau qui permette de faire une barre à mine digne de ce nom. Il faut sauter quelques siècles, en fait jusqu'à la fin du XVIIe siècle ou au début du XVIIIe, pour trouver de véritables barres à mine employées avec des explosifs : aux carrières de meules de moulin de Quaix-en-Chartreuse en Isère on retrouve, au sommet des fronts de taille les plus récents, les trous laissés par ces outils de forage (Alain Belmont, Les carrières de meules de moulin de Quaix-en-Chartreuse (XVIe-XVIIIe siècle), dans CAIRN, vol. 16, 2001-2002). Au XIXe siècle, la barre à mine connaît des heures fastes avec le percement de nouvelles voies de communication et les grands travaux d'aménagement des terroirs agricoles. Le tunnel du Lioran dans le Cantal, commencé en 1839 et terminé en 1847, lui doit une fière chandelle (cf. http://www.cantal.equipement.gouv.fr/lioran/projet/historique/historique.htm). Mais le tunnel du Mont-Cenis entre la France et l'Italie, commencé en 1857 à la barre à mine, est poursuivi, à partir de 1861, à la toute nouvelle perforatrice à air comprimé (cf. http://www.icsa.ch/museum/construction/tunalpes.html). Dans le domaine agricole, l'emploi de la barre à mine est attesté pour la construction ex-nihilo de champs dans le massif du Coiron en Vivarais entre 1850 et 1870 : à côté de la pioche, de la pelle et de la brouette, c'est l'outil des faiseurs de champs qui transforment une lande ou un bois en terre cultivable pour le compte d'un propriétaire (Christian Lassure, Cabanes en pierre sèche de France, Edisud, 2004, p. 163 : Les « faiseurs de champs » du massif du Coiron, Ardèche). Aujourd'hui, la barre à mine figure au catalogue des marchands d'outillage, sa morphologie variant au gré des usages auxquels elle est destinée : - une extrémité en pointe de diamant, l'autre plate (pour forer des trous, déchausser des pierres); - une extrémité en biseau, l'autre plate (pour creuser, faire levier); - une extrémité en pointe, l'autre en ciseau ou en palette (pour forer des trous, pour trancher); la section de la tige est généralement octogonale. [Cet historique de la barre à mine n'est qu'une esquisse provisoire, incomplète et peut-être erronée : toute correction sera la bienvenue]. (2) 1 m est une longueur minimale pour une barre à mine. Celles en vente dans les magasins d'outillage vont de 1 m à 3 m.
Pour imprimer, passer en mode paysage
© CERAV Référence à citer / To be referenced as : Christian Lassure
(texte), Gérald Pinault (photo et dessins)
Restauration d'une cabane de vigne et de ses abords au Bois de Lirate à
Vals-près-le-Puy (Haute-Loire) Tsabones du lieu-dit Le Crousas à Vals-près-le-Puy (Haute-Loire) Découverte d'un abri voûté sous terrasse au Bois de Lirate à als-près-le-Puy (Haute-Loire) Les cabanes en pierres sèches de Vals-près-le-Puy et alentour
page d'accueil sommaire maçonnerie
|