UN CHÂTELAIN BÂTISSEUR À PIERRES SÈCHES SOUS LE RÈGNE DE LOUIS-PHILIPPE À VEVY DANS LE JURA : JEAN-BAPTISTE CHEVILLARD
A proponent of dry stone walling under the reign of Louis-Philippe, at Vevy, Jura: castle owner Jean-Baptiste Chevillard
Christian Lassure À l'est du village de Vevy dans le département du Jura, au lieu dit « Champ Boulaud », dans les bois de « la Latte », s'étend un parc de 20 à 25 hectares, entouré de murs, avec en son centre un enclos aux murs en pierres sèches de près de 3 m de haut. Dans l'angle sud-ouest du parc, se dresse un vaste massif en pierres sèches, parementé sur 2 m 50 à 3 m de haut, en forme d'hémicycle, épais de 6 m en son centre et de 3 m à ses extrémités, ces dernières distantes de 18 m l'une de l'autre. Au centre du massif, côté façade, s'ouvre une guérite carrée, voûtée au moyen de deux encorbellements symétriques opposés. Deux plans inclinés symétriques, larges de 1 m 30, ménagés dans le parement des branches de l'hémicycle, permettent de monter au sommet du massif où se trouve une terrasse de 6 à 4 m de profondeur. Devant l'hémicycle, s'étend un terrain dégagé de 2 hectares environ, dit le « Clos du milieu ». Selon un schéma qui s'est répété pour certains sites à vestiges de pierre sèche dans d'autres régions, le parc avec son enclos, son hémicycle et autres constructions en pierre sèche (deux autres hémicycles, dont un avec banquette incoroporée et escalier volant pour accéder au sommet, plus deux croissants parementés dont un avec banquette incorporée), n'ont pas manqué de susciter de hardies hypothèses chez un érudit local : ce « Clos du milieu » ne serait rien moins qu'un « mediolanum » gaulois ayant servi de lieu de raout annuel à la peuplade des lieux … Las, ce bel échafaudage ne tient pas debout. Plus prosaïquement, c'est un châtelain local, passionné de chasse à courre, Jean-Baptiste Chevillard, qui fit construire, dans le 2e tiers du XIXe siècle, ces installations, dont la finalité n'est autre que cynégétique. Le haut enclos servait à abriter des cerfs, le grand hémicycle était une tribune d'où les invités du châtelain observaient les évolutions des cavaliers dans le « Clos du milieu », des rabatteurs se chargeant d'y pousser les bêtes. L'histoire locale nous apprend que Jean-Baptiste Chevillard, qui fut sous-intendant militaire sous Napoléon 1er, hérita en 1834 d'un « château » (en fait une belle maison bourgeoise du début du XVIIIe siècle) et de ses terres à Vevy, situation qui lui permit de donner libre cours à ses deux passions : les chevaux et la chasse. Ayant la nostalgie des châteaux, parcs et rendez-vous de chasse qu'il avait pu voir en parcourant l'Europe lors de l'épopée napoléonienne, il se fit aménager un superbe parc avec de nombreuses fabriques et installations, dont l'« Enclos du milieu ». Il n'est pas inutile de préciser que ce fondateur et organisateur de l'intendance napoléonienne fut aussi président de la société d'émulation du Jura, maire de Vevy, conseiller général du canton de Couliège, et agronome à ses heures, expérimentant sur ses terres de nouvelles cultures, dont le sanfoin. Pour faire édifier murs et installations en pierre sèche, il fit appel à la main-d'œuvre villageoise (Vevy comptait 400 habitants à l'époque), payée 2 ou 3 sous le mètre linéaire. Leur date tardive de construction (entre 1834 et 1853), leur présence sur un grand domaine privé, expliquent peut-être pourquoi ces vestiges en pierre sèche ne sont pas portés sur le cadastre. Source : Maurice Pelletier, Vevy. Histoire locale, dans : Florence Néret, Le mystère du Bois des Bans à Vevy, Association intercommunale pour le développement du Premier Plateau, Le Fied (33), septembre 1996, 23 p. Pour imprimer, passer en mode paysage © CERAV Référence à citer / To be referenced as : Christian Lassure page d'accueil sommaire datation
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