LES CABANES DE VALOJOULX (DORDOGNE).
ENQUÊTE ORALE, CADASTRALE, ARCHIVISTIQUE  ET ARCHITECTURALE

Investigating the stone huts of Valojoulx, Dordogne,
through oral history, land registers, archives and architectural analysis

Jean-Marc Caron

Résumé

Les deux cabanes de Valojoulx, inscrites à l’inventaire supplémentaire des monuments historiques, sont désignées sous le terme de « cabanes gauloises » par les responsables de la commune de Valojoulx et l’office de tourisme de la vallée de la Vézère. L’enquête qui suit a pour but de replacer ces cabanes dans le champ historique « post-Révolution » qui est le leur et dans le milieu social agricole auquel elles appartiennent. Il serait souhaitable que ces appellations mensongères disparaissent définitivement des argumentaires de mise en valeur du patrimoine local et touristique de la Dordogne.

 

La commune de Valojoulx se situe dans le Sud-Est du département de la Dordogne, à environ sept kilomètres au sud-ouest de Montignac. Suivant un arrêté préfectoral du 27 décembre 1991, deux cabanes jumelées sont inscrites à l’inventaire supplémentaire des monuments historiques ainsi que treize autres cabanes [1]. Le fait que ces constructions soient jumelées et que leur couvrement soit en « pain de sucre » constituaient des éléments importants à faire valoir pour l’obtention d’une protection [2] au titre des monuments historiques.

Les cabanes, « des atouts touristiques »

La commune de Valojoulx a rédigé une page de présentation de son village afin de mettre en valeur les différents atouts de son patrimoine. Cet exposé a été établi à l’intention de la communauté de communes de la vallée de l’Homme (anciennement vallée de la Vézère) afin d’étayer un dossier de demande de subventions [3]. Cette présentation se trouve sur le site de l’office de tourisme Lascaux-Dordogne, vallée Vézère à l’adresse : http://www.lascaux-dordogne.com/fr/valojoulx-dordogne. On peut y lire : « [...] Valojoulx possède des atouts touristiques telles les cabanes gauloises (inscrites à l’inventaire des monuments historiques) mais est également situé à quelques kilomètres du château de Losse, du site de Lascaux et de son facsimilé.[...] ».

Les cabanes sont propriété privée et appartiennent à la famille Veyret. Le fils, Eric Veyret est producteur de foie gras et membre du conseil municipal de Valojoulx. Interrogé sur l’origine de ces cabanes, il m’explique, sur place, qu’elles datent du douzième siècle et ajoute « qu’elles sont inscrites aux Monuments historiques, que des gens sont venus et que ce sont eux qui ont daté les cabanes, qu’il y a des archives... ».

De son côté, la secrétaire de mairie, contactée par téléphone, me dit que ces cabanes sont gauloises et à ma question sur le fondement de ces origines, l’argument demeure encore celui des Monuments historiques.

Que ces cabanes soient gauloises ou du XIIe siècle (on n’en est plus à quelques siècles près…), les Monuments historiques sont toujours mis en avant comme référence : qui oserait en effet mettre en doute le rapport des Monuments historiques ?

Ces cabanes méritent mieux que cela. Il est important de les replacer au sein du monde rural d’après la Révolution.

Les monuments historiques

Un premier point essentiel est que jamais les Monuments historiques n’ont fait remonter ces cabanes à des époques aussi hautes. En novembre 1991, le documentaliste Pierre Moreau, qui avait constitué le dossier de protection des cabanes, écrivait dans son rapport : « [...] En l’absence d’une étude archéologique scientifique de synthèse, une réflexion simple à partir de leur construction, de leur implantation et de leur fonction probable laisse penser que ces cabanes ont été bâties pour la plupart au siècle dernier, et ne peuvent être antérieures au XVIIème siècle [...] ».

I - Cadastre napoléonien

L’examen du cadastre napoléonien est la première source d’informations à consulter. Celui de Valojoulx date de 1813. Il se compose de quatre sections, Le Bourg (1 feuille, A), Fraisse (1 feuille, B), Manègre (3 feuilles, C1, C2, C3), Cailloux (2 feuilles, D1, D2).

Fig. 1 - Cachet du cadastre napoléonien de 1813.

 

L’observation de la feuille D2 où se situent actuellement les hameaux dits « Les Cabanes » et « Castel Merle », révèle un site nommé « Péchaliou » [4] comprenant quatre bâtiments. Ces derniers forment deux groupes séparés l’un de l’autre par 250 mètres environ. L’un constitué par un bâtiment quadrangulaire et un bâtiment subcirculaire (parcelle N° 137), l’autre par un bâtiment en forme de « L » et un bâtiment quadrangulaire [5] (parcelle N° 130). On remarque l’absence de tout autre construction. Le groupe N° 137 s’appelle aujourd’hui « Castel Merle » [6] et le groupe N° 130 « Les Cabanes ».

 

Fig. 2 - Site de Péchaliou, cadastre napoléonien.

 

Fig. 3 - Agrandissement de détail du site de Péchaliou.

 

Une vérification sur le terrain de la construction circulaire N° 137 révèle une cabane circulaire dont le couvrement est très endommagé, un large trou s’ouvrant dans la voûte et fragilisant l’ensemble de l’édifice. Mais cette construction existe sur l’ancien cadastre, elle est donc antérieure à 1813. C’est, sur l’ancien cadastre et sur le site de « Péchaliou », la seule cabane qui existe avec les trois constructions habitées. C’est tout ce que le géomètre, Labrousse de Soufron, a relevé.

Fig. 4 - Cadastre actuel de « Les Cabanes » et Castel Merle.

 

Fig. 5 - Distance (260 m) entre la cabane de Castel Merle et les cabanes jumelées du lieu-dit « Les Cabanes »

 

Fig. 6 - Situation en 1813 d’une maison isolée nommée Castel Merle, Section Manègre, feuille C1.

 

Fig. 7 - Aujourd’hui, disparition du lieu-dit Castel Merle nommé sur l’ancien cadastre.

II - Actes de la fin du XVIIIe siècle et du XIXe siècle

Le site de Péchaliou a été habité tout au long du XIXe siècle. À la fin du XVIIIe siècle, en 1793, le nom de Jeanne Joubert revient très souvent sur les actes de naissance, elle est sage-femme et demeure au lieu-dit « Piuchaliu » (Péchaliou).

Le nom de Trefel est présent dès le début du XIXe siècle. La fille de Jeanne Joubert, Michelle Trefel, mettra au monde le 23 mars 1809 un enfant : Jean Prouilhac au lieu-dit Péchialiou. En 1812, le 3 juillet, Jeanne Trefel naît à Péchaliou. Le 19 octobre 1836, Jeanne se marie avec François Lespinasse du village voisin de la Chapelle Aubareil. De leur union, naîtra, le 30 septembre 1837, un premier enfant, Jean Lespinasse, au lieu-dit Péchaliou, puis Pierre (ou Jean d’après l’acte de naissance) trois ans plus tard et Anne (ou Marie) cinq ans après. L’acte d’état civil de Pierre (mentionné Jean) indique comme lieu de naissance : « Les cabanes » alors que le lieu de naissance de son frère aîné s’appelait « Péchaliou ».

Le nom du lieu « Aux cabanes » apparaît, pour la première fois, sur le recensement de 1841 et compte deux ménages pour 8 habitants. En 1846, le recensement compte deux ménages et 12 habitants et le nom attribué est celui de « Puic(é)ili » (Péchaliou). En 1851, on compte deux ménages pour 13 personnes puis en 1861, deux ménages pour neuf personnes et en 1876 la famille Lespinasse est réduite à quatre individus, les parents et leurs deux enfants. Enfin, en 1891, il ne reste plus que les parents Jean, sa femme Françoise Delbary, et leur fille Anne (Jeanne).

Le 14 janvier 1896, Jeanne Lespinasse épouse Etienne Veyret, maçon, né le 7 mars 1870 à Marquay. Etienne Veyret était l’oncle de M. Veyret père, âgé aujourd’hui de 86 ans.

 

Fig. 8 - Acte de mariage de Jeanne Lespinasse et Etienne Veyret du 14 janvier 1897.

 

Fig. 9 - Acte de mariage (suite). Mme Veyret mère m’a dit que la femme de l’oncle Etienne s’appelait Anna, c’est ainsi que se faisait appeler Jeanne : Anne ou Anna, la signature en bas de l’acte de mariage confirme les propos de Mme Veyret.

 

Fig. 10 - Acte de naissance de Jean Lespinasse, père de Jeanne Lespinasse, le 30 septembre 1837 à « Puicheliu » (Péchaliou).

 

Fig. 11 - Acte de naissance de Jeanne Lespinasse le 24 février 1869.

III - Les cabanes

Le lieu-dit « Les Cabanes » est constitué par une propriété agricole de la famille Veyret, dont une des activités est l’élevage d’oies et de canards.

Derrière l’habitation, à quelques mètres, se trouve une première cabane circulaire. Une vingtaine de mètres plus loin, se dresse un groupe de deux cabanes. Ce sont celles qui sont inscrites à l’inventaire supplémentaire des monuments historiques. Ce qui frappe le plus l’esprit, ce sont les deux couvrements en forme de « pain de sucre ». Leur aspect hérissonné est dû à la disparition de la couverture de lauses [7]. La partie visible est l’extrados de chaque voûte d’encorbellement (Fig. 17). La famille Veyret a toujours connu ces toitures dans cet état Le fils, Éric, me dit que son grand-père avait démoli d’autres cabanes pour en récupérer la pierre et l’utiliser à la construction de la grange. La lause a-t-elle été également récupérée pour être réemployée ? Personne ne le sait dans la famille.

 

Fig. 12 - Plan schématique des cellules A et B et positionnement des hiatus visibles.

 

L’entrée de la cellule B est surmontée d’un linteau et d’arrière-linteaux en bois, le tout est couvert d’une grande dalle calcaire, posée avec un débord important pour protéger les bois. On voit très bien que cette entrée (les linteaux, la dalle et les rangées de lauses supérieures) a été entretenue. Ces modifications sont déjà présentes sur des photos prises en 2003. Lors de ma dernière visite des lieux, j’ai posé la question à Mme Veyret sur d’éventuelles interventions sur les cabanes. À la suite du classement des cabanes, M. et Mme Veyret avaient obtenu une petite subvention qui était cependant loin de couvrir les frais occasionnés. C’est l’entreprise Chapoulie de Saint-Geniès en Dordogne, lausiers de père en fils depuis trois générations, qui a effectué un recalage des lauses et la pose de la larmière (Fig. 13). Le fils Thierry m’a expliqué la nature des travaux par téléphone et les a situés vers 1996 ou 1997. Aucune intervention n’a été effectuée sur les voûtes.

 

Fig. 13 - Dalle larmière et scellement au mortier des pierres de chaque côté du linteau.

 

Fig. 14 - Source : http://pierreseche.chez-alice.fr/detoiturees.htm : « Photo publiée dans Maisons paysannes de France, 26e année, 2e trimestre 1991, no 100, p. 8. » (antérieurement à la réfection de l’entrée visible).

 

Fig. 15 - Cabane de Valojoulx, cellule B, 2003.

 

Fig. 16 - Cabane de Valojoulx 2015, cellule B. Avec ses branchages touchant l'extrados de la voûte, l'arbre poussant sur la droite est un danger pour la conservation du bâtiment

 

Fig. 17 - Partie hérissonnée formée par l’extrados de la voûte d’encorbellement, cellule B.

 

L’accès aux cabanes se fait par un chemin aménagé en pente douce. Sur la gauche, un mur de pierre sèche soutient la partie supérieure du terrain (Fig. 36). Le sol semble avoir été décaissé avant la construction de la cabane. La première cellule est surmontée d’une voûte conique de pierres fines (de 3 à 5 cm d’épaisseur) protégée de dalles calcaires. Sur la gauche de l’entrée, le mur est arrondi vers le passage de communication à la cellule A.

À droite en entrant, existe un décrochement d’une vingtaine de centimètres avec un hiatus (Fig. 12, hiatus 2). Au-dessus du décrochement, se trouve une pierre plate servant de pendentif (Fig. 20), permettant ainsi le passage du décrochement à la voûte conique. Une ouverture débouche à l’extérieur sous le pendentif. Ce décrochement abritait peut-être un tuyau de poêle, d'abord vertical puis coudé sous le pendentif,  pour l'évacuation de la fumée.

 

Fig. 18 - Décrochement important visible sur la droite de l’entrée de la cellule B (hiatus 2).

 

Fig. 19 - Hiatus 2, détails.

 

Fig. 20 - Pierre faisant office de pendentif et couvrant le décrochement pour bâtir la voûte ainsi qu’une ouverture vers l’extérieur (cette ouverture à travers la paroi pourrait bien avoir accueilli un conduit pour évacuer la fumée d’un poêle en fonte).

 

Juste en face de l’entrée, au fond de la cellule, un autre hiatus est bien visible (Fig. 12, hiatus 1, et Fig. 22), il se situe entre le début du mur vers la cellule A et le mur de la cellule B qui se prolonge en arc de cercle vers le décrochement (Fig. 12, hiatus 2, et Fig. 19). Une ouverture vers l’extérieur, surmontée d’un linteau en bois, est présente sur ce mur (Fig. 21). Cette cellule mesure 2,80 m de diamètre au sol, l’épaisseur du mur à droite de l’entrée est de 0,80 m, à gauche il se prolonge sur 2,60 m en arrondi vers le couloir. La cellule comprend également une niche obstruée (Fig. 21) et des boulins. Il existe un hiatus entre les pierres au-dessus de l’arrière-linteau (Fig. 23) et le mur qui va vers le couloir, ce mur est bâti droit jusqu’à la hauteur d’un premier boulin, la rangée supérieure a été posée en retrait.

 

Fig. 21 - Photo N° 1, niche obstruée dans le mur qui accède au couloir ; photo N° 2, ouverture cellule A ; photo N°3, ouverture cellule B.

 

Fig. 22 - Hiatus 1 entre le couloir et la cellule B.

 

Fig. 23 – Hiatus 3 au-dessus de l’arrière-linteau de la cellule B.

 

Fig. 24 - Couloir vu à partir de la cellule A vers la cellule B.

 

Le couloir de communication entre les deux cellules est réalisé de chaque côté en encorbellement. Les deux parois opposées se contrebutent mutuellement formant une sorte de carène, au profil en forme d’« as de pic » du côté de la cellule B. Des pierres sont posées comme pendentifs au-dessus des deux entrées du couloir, pour la construction des voûtes. Le couloir mesure 2,50 m de long du côté gauche et 3,10 m du hiatus à l’entrée de la cellule A, il est large de 1 m à 1,10 m. Ces cabanes sont toujours décrites comme des constructions à pierre sèche, pourtant la cellule A est bâtie à la terre jusqu’à la voûte (Fig. 25). Cette cellule est légèrement ovoïde, elle mesure 3,50 m sur 3,60 m, les murs de l’entrée ont une épaisseur de 1,20 m d’un côté et de 1,10 m de l’autre. La voûte est conique et fermée de dalles. Une ouverture existe au-dessus de l’entrée, dans l’encorbellement de la voûte. Une niche est présente dans le mur au fond de la cellule (Fig. 21) et une poutre est en place au départ de la voûte.

 

Fig. 25 - Cellule A bâtie à la terre.

 

Fig. 26 - Voûte d’encorbellement de la cellule B.

 

Fig. 27 - Voûte d’encorbellement de la cellule A.

 

On observe, sur la partie postérieure des cabanes, un tas d’épierrement (Fig. 28), éventré en son milieu et qui s’achève à l’endroit du hiatus observé dans la cellule B. Ce tas s’appuie au départ sur le côté gauche de la cellule A (Fig. 34), il est bâti sur la pente du terrain et longe l’ensemble arrière de la cellule A et le couloir.

 

Fig. 28 - Vue extérieure derrière les constructions.

 

Fig. 29 - Hiatus 1, vue de l’extérieur, entre le tas d’épierrement et la cellule B.

 

Fig. 30 - Tas d’épierrement sur le côté gauche (quand on est face aux cabanes) et derrière la cellule A ainsi que sur la longueur du couloir.

 

Fig. 31 - Muret pris dans le parement de la cabane B.

 

La cellule A a subi plusieurs modifications au niveau de l’entrée (Fig. 34). Les linteaux qui supportent les pierres sous la lucarne n’ont pas été bâtis en retrait du mur, c’est l’inverse, le mur s’est construit devant cette cellule.

 

Fig. 32 - Entrée de la cellule A, le jambage côté droit, en regardant vers l’extérieur.

 

Fig. 33 - Cliché rapproché de la fig. 32. Un écartement entre les pierres est visible à l’aplomb du premier linteau. Il s’agit non pas d’une « lézarde » du jambage mais du début du tas d’épierrement (Fig. 34).

 

Fig. 34 - Entrée de la cellule A et début du tas d’épierrement.

 

Fig. 35 - L’entrée de la cellule A.

 

La cellule A, maçonnée à la terre, est la première à avoir été bâtie. Le tas d’épierrement, construit sur sa gauche (en regardant l’entrée) et derrière elle, file sur la longueur du couloir. Le tas, la cellule et son couloir d’accès en forme de carène constituent un ensemble homogène  [8]. Le tas d'épierrement s’est agrandi ensuite progressivement.

La cellule B fut construite postérieurement à cet ensemble comme l’attestent les hiatus observés dans cette cellule. Quand on accède à cette cabane, sur le chemin en pente douce, on voit sur la droite et dans le mur de la cabane, les restes de l’amorce d’un muret (Fig. 31). Les constructeurs sont passés sur le muret pour bâtir le mur de la construction. On remarque que le mur de soutènement limitant le chemin d’accès est aussi réalisé en deux fois. On aperçoit (Fig. 36) un décrochement et un hiatus (Fig. 12, hiatus 4). Le mur, à gauche, au premier plan, est la partie la plus récente, contemporaine de la cellule B à droite.

 

Fig. 36 - Accès aux cabanes.

Conclusions

Le cadastre de 1813 ne montre rien à l’endroit des cabanes « jumelles » de Valojoulx, mais laisse voir, à 250 m des deux cabanes actuelles, un bâtiment circulaire qui existe encore aujourd’hui : il s’agit d’une cabane circulaire, au couvrement en mauvais état (Fig. 37), située à 250 m des deux autres cabanes.

En examinant les actes des naissances, des mariages, les recensements et les noms de lieux, on constate que le nom « Cabanes » apparaît en 1841 et qu’il est absent en 1837.

Les familles Trefel, Lespinasse et Veyret se sont succédées jusqu’à nos jours par des mariages et des gendres qui sont restés sur la propriété. Il existe une forte probabilité pour que ces cabanes aient été édifiées entre 1837 et 1841 par la famille Trefel /Lespinasse.

Ces cabanes sont présentées comme « jumelles », comme si elles avaient été construites ensemble, alors que des éléments observés (hiatus, maçonnerie à la terre en A et maçonnerie à sec en B) attestent une construction par étapes.

À propos du rôle d’habitation qu’auraient eu ces cabanes au début du XIXe siècle, Mme Veyret déclare : « ma belle-mère m’a raconté que quelqu’un lui aurait dit que... ces cabanes auraient servi d’habitation, il y a au moins 200 à 250 ans ». C’est sans doute pour cela que certains auteurs ont vu dans l'une des cellules une cuisine et dans l’autre une chambre et affirmé qu’une « pauvresse » y vivait au début du XIXe siècle.

Ces cabanes, âgées d’environ 175 ans, s’inscrivent pleinement en tant qu’abris dans l’agriculture du XIXe siècle et dans l’histoire des familles qui vivaient sur place à cette époque. Les déclarer « cabanes gauloises » ou « romanes » relève de l’affabulation.

 

Fig. 37 - Cabane qui existe sur l’ancien cadastre de 1813, située à 250 mètres des autres constructions. Elle donne une idée de la forme initiale de la couverture de lauses des cabanes « jumelles ».

NOTES

[1]  Arrêté préfectoral signé le 27/12/1991 par le préfet de région, Pierre Chassignaux, publié dans L’Architecture vernaculaire, tome XV, 1991, page 35.

[2]  Extrait du procès verbal de la COMMISSION RÉGIONAL DU PATRIMOINE HISTORIQUE, ARCHÉOLOGIQUE ET ETHNOGRAPHIQUE D’AQUITAINE - SÉANCE DU 26 NOVEMBRE 1991 :
« [...] Le choix des cabanes proposées ici à la protection au titre des monuments historiques a été établi à partir de ces études et d’une certaine connaissance du terrain, en tenant compte de l’exemplarité et de l’originalité de certaines de ces réalisations; mais à cause de leur nombre et de l’étendue de leur répartition, ce choix ne peut pas prétendre à une représentativité significative. {...] ».

[3]  Explications fournies par la secrétaire de Mairie, contactée par téléphone.

[4]  Je note ici l’orthographe de l’ancien cadastre mais celle-ci varie parfois sur les registres d’état civil.

[5]  Une petite construction, autrefois propriété de la famille Lespinasse et couverte de lauses, a été démolie en mai 1968 par la famille Veyret, pour faciliter la construction d’un hangar. Il est plus que probable que ce soit la construction présente sur le cadastre napoléonien sur la parcelle N° 130.

[6]  Il existe une construction isolée et nommée « CASTELMERLE » sur la feuille C1 de la section « Manègre » de l’ancien cadastre.

[7]  Extrait de procès verbal de novembre 1991 relatif au classement des cabanes : « [...] M. FONQUERNIE précise que les cabanes en pain de sucre sont des édifices à la toiture inachevée.[...] ».

[8]  La cellule, bâtie à la terre, est toutefois une construction indépendante du tas d'épierrement et antérieure à celui-ci.

 

Jean-Marc Caron,
La Plaine de La Guigne
24250 SAINT-CYBRANET
jm@jm-photos.net


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© CERAV
30 juin 2015 / June 30th, 2015

Référence à citer / To be referenced as :

Jean-Marc Caron
Les cabanes de Valojoulx (Dordogne). Enquête orale, cadastrale, archivistique et architecturale (Investigating the stone huts of Valojoulx, Dordogne, through oral history, land registers, archives and architectural analysis)
http://www.pierreseche.com/valojoulx_cabanes.htm
30 juin 2015

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