L'ARCHITECTURE VERNACULAIRE

 

 

ISSN  2494-2413

TOME 46-47

2022 - 2023

Jean-Marie Barre

CONSTRUCTION D'UNE CABANE DE GARDIAN À VILLETELLE (HÉRAULT)

 

 

Résumé

Cet article est la relation en images des diverses étapes de la construction, en 2006, d'une « cabane de gardian » semblable à celles qui, dans la Camargue des XIXe et XXe siècles, servaient  de logements aux bouviers des manades et aux ouvriers du sel. Ont été employés les mêmes matériaux : bois et sagne pour les murs latéraux et la croupe, pierres de remploi pour le mur pignon.

 

Abstract
This article is the relation in pictures of the various stages of the construction, in 2006, of a "gardian's hut" similar to those which, in the Camargue of the 19th and 20th centuries, served as housing for herdsmen and salt workers. The same materials were used: wood and reed for the side walls and the hip, reused stones for the gable wall.

 

 

Cet article se propose de relater l'édification par mes soins, en l'espace de huit mois, d'une cabane de gardian et de ses abords selon les techniques et avec les matériaux en usage aux XIXe et XXe siècles. Le lieu de construction est l'aire dite d'Ambrussum en bordure de l'autoroute A9 (dans le sens Nîmes-Montpellier), sur la commue de Villetelle dans L'Hérault.

La cabane, dont la conception provient de l'étude de documents aux archives d'Arles, est inspirée de celle reconstituée au museon Arlaten à Arles à partir d'une cabane ouvrière de Salin-de-Giraud (Bouches-du-Rhône). Contrairement à la cabane réalisée dans le cadre du musée de la Camargue, seul du mortier de chaux a été utilisé.

Les vingt-six photos qui suivent et leurs légendes respectives consignent  les différentes étapes de la construction.de la cabane et de son environnement aquatique.

 

 

 

Fig. 1 - Site d'implantation d'après GoogleEarth.

Pour voir la cabane de gardian et les deux autres édifices qui l’accompagnent (un mazet, bâti en 2003-2004, et une capitelle, édifiée en 2004-2005), suivre les instructions suivantes :

Sur l’autoroute A9 (depuis laquelle elles sont visibles dans le sens Nîmes Montpellier), quelques km après le péage de Gallargues en direction de Montpellier, sortir à l’aire/station d’essence dite d’Ambrussum, et se garer tout de suite à droite. Un portique permet d’accéder à pied sur la route d’accès technique à l’aire. Le franchir et faire 50 m, le mazet, la cabane de gardian et, après, la capitelle, distantes de 100 m l’une de l’autre, se découvrent à quelques mètres.

 

 

Fig. 2 - Le chantier à ses débuts : sur la gauche de l'allée et en contrebas de la terrasse s'alignent, au premier rang, les pierres pour la façade et, plus loin, les pierres et les matériaux pour les fondations. L'aire d'implantation de la cabane est entre les deux, celle de la mare s'étend devant la rangée de pierres. Au bout du chemin, on aperçoit la cabane en pierre sèche édifiée en 2004-2005.

 

 

Fig. 3 - Creusement de la tranchée de fondation, large de 70 cm et profonde de 50 cm.

 

 

Fig. 4 - Pour éviter le pourrissement de la base des piquets ou pieux (pau), un dispositif particulier a été mis au point alternant support ou plot maçonné au mortier et drain rempli de pierraille destiné à accueillir les piquets.

 

 

Fig. 5 - Vue du dispositif en cours de construction au niveau de l'abside.

 

 

Fig. 6 - Les piquets des murs latéraux et de l'abside sont en place ainsi que le poteau de fond devant soutenir, avec le mur-pignon (pignoun), la poutre faîtière (arenié mestre).

 

 

Fig. 7 - Au premier plan, un élément de panne sablière (arenié) terminé par une enture.

 

 

Fig. 8 - L'armature de piquets et de pannes sablières formant les parois est terminée. Le tour de l'abside est de saule, coupé sur les bords d’une rivière proche et écorcé et blanchi à la chaux. C'est le seul bois capable d'épouser les courbes de l'abside.

La construction de la façade de pierres liées au mortier a commencé. Il s'agit de pierres de récupération provenant d'un village voisin.

 

 

Fig. 9 - Vue de la charpente une fois posée : les chevrons (travetos, travettes) s'appuient en bas sur les pannes sablières et en haut sur la panne faîtière (arenié mestre). Il s'entrecroisent deux à deux sur celle-ci. Le pignon étant en pierres maçonnées, l'autre bout de la faîtière repose à l'apex de celui-ci. Un deuxième poteau de fond n'est pas nécessaire. 

 

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Fig. 10 - Ecorçage des gaules (coundorso) de saule provenant du Vidourle.

 

 

Fig. 11 - Les gaules de saule, fixées sur les chevrons, sont en attente de la couverture de roseau des marais (sagno, sagne).

 

 

Fig. 12 - Les gaules de saule devant servir à attacher les javelles ou manons (manouns) de sagne sont en cours de pose. Il y a huit rangées en tout. Le chevron médian (traveto centrale) de la croupe se prolonge au-dessus de la faîtière de façon à servir de hampe à une croix.

 

 

Fig. 13 - Le bois a été entièrement traité à la chaux et la façade est en train d'être crépie. La fenêtre  prévue dans le mur latéral  de droite est en place.

 

 

Fig. 14 - Habillage des parois avec des manons disposés verticalement côte à côte et attachés aux condorses avec du fil de fer.

 

 

Fig. 15 - Le revêtement de manons de roseau juxtaposés n'attend plus que son enduit de mortier à la chaux en cinq couches (aliscage en mourtié ou cacho-faio).

 

 

Fig. 16 - Les parois de javelles de roseau après avoir reçu leur enduit de mortier à la chaux.

 

 

Fig. 17 - Pose d'une rangée de javelles de roseau. elles sont fixées sur du bois par du fil de fer (1500 m linéaires au total) selon une technique dite du « dessus-dessous ». Quatre tonnes de sagne provenant directement de Camargue ont été nécessaires. La couverture des deux versants et de la croupe avec de la sagne a pris deux mois.

 

 

Fig. 18 - La couverture de roseau est entièrement posée, le faîtage est protégé par une file de tuiles creuses, l'avancée des rampants au-dessus du pignon est recouverte d'une chape de mortier de chaux de chaque côté de la cheminée. Il ne reste plus qu'à recouvrir de ce même mortier, armé avec du grillage en nid d'abeille, la rangée supérieure de manons et le haut de la croupe.

 

 

Fig. 19 - Vue de la paroi arrière de la façade avec l'âtre surélévé dans la moitié gauche et l'entrée dans la moitié droite. Un emplacement sous la niche reçoit la jarre d'eau. Les carreaux de la porte d'entrée) sont, avec les deux fenêtres latérales, les seules sources de lumière de l'intérieur. Le recoin entre le montant de la cheminée et la paroi de bois et sagne sert à entreposer la réserve de bois. La porte provient d'un ancien mas.

 

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Fig. 20 - La même vue mais avec la porte d'entrée ouverte : on aperçoit, entre les piquets de la paroi latérale et les chevrons (cabrioun) de la toiture, la sous-face du sagne de couverture. Le sol est en terre battue, amendée avec de la chaux.

Une discrète inscription a été apposée sur le haut du revers droit de la hotte, en hommage à mon oncle arlésien Jean Bernardi (aujourd’hui disparu), qui m’a beaucoup conté la Camargue, notamment au travers des techniques employées pour la construction des rizières, des roubines, des outillages spécifiques, et plus généralement des aspects vernaculaires qu’il a bien connus, lorsqu’il vivait avec sa famille, à Chartrouse (Salin-de-Giraud).

 

 

Fig. 21 - Vue d'ensemble de l'intérieur prise depuis le seuil. Le poteau de fond et la barrière à sa droite marquent la séparation entre la pièce à vivre à l'avant et la chambre à coucher à l'arrière (dans l'abside). La fenêtre provient d'un ancien mas.

 

 

Fig. 22 - Vue de trois quarts droite de la cabane terminée et de la mare qui la précède.

 

 

Fig. 23 - Vue latérale de la cabane. En raison de sa saillie, la rive de la couverture de sagne a été échancrée au-dessus de la fenêtre.

 

 

Fig. 24 - Vue de trois quarts droite et en plongée de l'abside et de la croupe de la cabane. Il y a sept rangées de sagne visibles, la rangée inférieure est double. Une lucarne (fenestroun) est percée dans le mur gouttereau.

 

 

Fig. 25 - Le chantier à son achèvement : l'étang a été entourée d'une clôture de piquets de bois et de fil de fer. Des plantes aquatiques propres à la  Camargue ont été implantées dans des cuvettes respectant la hauteur nécessaire à chaque type de plante. La réalisation  des abords aura pris deux mois.

 

 

Fig. 26 - La cabane côté façade avec son appentis rudimentaire censé protéger du soleil. La construction du bâtiment aura pris six mois et celle de ses aménagements et abords (étang, plantations aquatiques endémiques) deux mois.

 

 

 

 

Référence à citer / To be referenced as :

 

Jean-Marie Barre

Construction d'une cabane de gardian à Villetelle (Hérault) (Building of a "cabane de gardian" at Villetelle, Hérault)

L'Architecture vernaculaire, CERAV, Paris

tome 46-47 (2022-2023)

http://www.pierreseche.com/AV_2022_jean-marie_barre.htm

14 mai 2023
 

L'auteur / The author :

Artiste peintre et décorateur de théâtre et de cinéma, Jean-Marie Barre est aussi l'auteur d'un mazet en 2003-2004), d'une capitelle (en 2004-2005) et d'une cabane de gardian (en 2006) à Villetelle dans l'Hérault.

 

 

Du même auteur, dans pierreseche.com :

 Construction d'une capitelle dans la région de Lunel (Hérault)

 


 

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