RÉFECTION DE LA COUVERTURE DE LAUSES D'UNE CABANE
AU LIEU-DIT NOUEL À LALBENQUE (LOT)

Redoing the roof covering of stone tiles of a cabane
at the place known as Nouel at Lalbenque, Lot

Christian Lassure (texte), Dominique Repérant et Daniel Pasquier (photos)

La cabane dite de Nouel à Lalbenque dans le Lot est une cabane en pierre sèche bien connue des spécialistes de l'architecture rurale lotoise. Elle a été décrite par Pierre Dalon et par l'auteur de ces lignes (1).

Elle se trouve à deux kilomètres de Lalbenque, sur le côté droit de la départementale 6, en direction de Cahors.

Elle consiste en un corps de base cylindrique, au fruit très marqué, sous une toiture en forme de cône rectiligne à la rive saillante. Son périmètre extérieur est de 22 m et son diamètre intérieur de 4 m 90. L'épaisseur moyenne du mur porteur est de 1 m 20. La hauteur de la voûte est de 5 m 45. Selon Pierre Dalon, la cabane de Nouel est la plus grande du causse de Limogne.

Avec une autre cabane de même forme et de même fonction située au lieu-dit La Bertrande à Laburgade, elle appartient à cette catégorie de bergeries isolées dans les champs ou dans les bois dont les propriétaires étaient soit de petits agriculteurs, soit des artisans ou des commerçants disposant de quelques terres. Les plus petites hébergeaient moins de 10 bêtes, la plupart de 10 à 15 bêtes.

Comme elle est située au sud de la rivière Lot, son nom générique est « cabane » (cabano dans le parler carcinol) mais sa désignation fonctionnelle est «bergerie » ou « jasse » (jasso). En aucune manière, on n'a affaire à une « gariote » (garioto), terme qui s'applique normalement aux guérites incorporées dans les murs, ni à une « caselle » (casèlo), c'est-à-dire une petite maison, encore que des écrits et des cartes postales aient entretenu et entretiennent toujours une regrettable confusion terminologique.

Elle a été construite entre 1850 et 1860, soit sous le Second Empire (1852-1870), la famille Brunet, propriétaire de l'enclos où elle se dresse, possédant un acte notarié de 1840, où la cabane ne figure pas, et un autre, de 1860, où elle figure. Elle était estimée à 150 francs-or en 1860 (2).

Des trous étant apparus ces dernières années dans les parties nord et ouest de la couverture (sans doute à la suite de glissements de lauses), le propriétaire a fait changer toutes les lauses par un artisan pour un coût de 20 000 euros, supporté en partie par lui-même et par la Région et le  Département en raison de la valeur patrimoniale de la cabane. Le projet a pu aboutir grâce à l'action de l'association de sauvegarde de l'environnement du pays de Lalbenque (l'ASEL) (3).

La cabane, photographiée par Dominique Repérant dans la première moitié des années 2000. Le cône de la toiture est rectiligne à l'exception du léger coyau formé par l'assise de grandes lauses saillantes à sa base. Les lauses sont des plaquettes brutes, disposées sans former d'assises régulières. La porte d'entrée en bois, à deux vantaux, qui fermait cette ancienne bergerie, n'est plus. Le linteau en bois  remonte à une réfection opérée dans les années 1970.

 

L'intrados de la voûte, photographié par Dominique Repérant dans les années 2000. Les trois poutres plus ou moins parallèles entre elles correspondent à un ancien plancher ayant servi au moment de l'édification du voûtement. Il n'y a pas d'assisage réglé des pierres. Certaines ont leur parement ragréé au marteau (opération qui s'effectue avant la pose).

 

L'extrados du voûtement mis à nu après enlèvement des lauses, preuve que la couverture de lauses n'est pas indispensable à la stabilité de la voûte d'encorbellement. Son rôle est principalement de rendre la cabane étanche. L'extrados laisse voir les queues des pierres placées en boutisses et les cales qui les bloquent. À gauche de l'entrée, trois premières assises de grandes lauses (de récupération ?) viennent d'être disposées.

 

L'extrados du voûtement à gauche de l'entrée. Il se dresse nettement en retrait par rapport au parement du corps de base de l'édifice. Un échafaudage a été posé pour pouvoir poser les premières lauses de remplacement.

 

L'extrados du voûtement à l'arrière de l'édifice. On remarque que les trois premières assises de lauses ont été posées sans ménager le très faible coyau qui existait dans la couverture initiale. Les lauses sont posées en panneresses..

 

Le haut du cône du voûtement a été aplani pour poser un cercle en bois du haut duquel partent plusieurs fils lestés d'une pierre et servant à donner la pente de la couverture. Il suffit de déplacer le fil au fur et à mesure que l'on ajoute une lause à l'assise en cours. Il y a déjà douze assises de posées.

 

La 13e assise en train d'être posée depuis l'échafaudage entourant la base cylindrique de l'édifice. Les lauses sont non plus les plaquettes brutes et irrégulières initiales mais des dalles bien plates taillées en rive et sur les côtés en retour.

 

La couverture posée aux trois quarts. On a fait appel aux grands moyens : l'échafaudage a été surélevé, le bras articulé d'un engin mécanique hisse les palettes de pierre à hauteur du chantier.

D'une cabane à 150 francs-or on est passé à une cabane à 20 000 euros. Gageons que la nouvelle couverture donnera à l'édifice un nouveau bail de 150 ans.

NOTES

(1) Christian Lassure, Dominique Repérant, Cabanes en pierre sèche de France, Édisud, 2004, p. 32. - Pierre Dalon, Les cabanes en pierre sèche du causse de Limogne, dans Bulletin de la Société des études du Lot, t. XCIV, 2e fasc., avril-juin 1973, pp. 103-131, en part. pp. 107-111 ; Pierre Dalon, Les cabanes en pierre sèche du causse de Limogne (Lot), dans L'Architecture rurale en pierre sèche, t. 1, 1977, 26-29 et figs 1-4, en part. p. 26.

(2) Daniel Pasquier, Il faut sauver la caselle de Nouel, dans La caselle enchênée. La gazette de l'association de sauvegarde de l'environnement du pays de Lalbenque, février 2010, No 17, pp. 1-2.

(3) Daniel Pasquier, Des nouvelles de la caselle de Nouel, La caselle enchênée. La gazette de l'association de sauvegarde de l'environnement du pays de Lalbenque, juin 2010, No 25, p. 5 ; idem, Rajeunissement d'une vieille dame, dans La caselle enchênée. La gazette de l'association de sauvegarde de l'environnement du pays de Lalbenque, octobre 2011, No 25, p. 1.

Cet article n'aurait pas vu le jour sans l'intervention de Jean Laffitte qui nous a tenu informé du chantier. Qu'il en soit ici vivement remercié.


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© CERAV
3 août 2012 / August 3rd, 2012

Référence à citer / To be cited as :

Christian Lassure (texte), Dominique Repérant et Daniel Pasquier (photos)
Réfection de la couverture de lauses d'une cabane au lieu-dit Nouel à Lalbenque (Lot) (Redoing the roof covering of stone tiles of a cabane at the place known as Nouel at Lalbenque, Lot)
http://www.pierreseche.com/refection_couverture_nouel.htm
3 août 2012

Les caselles du haut Quercy          Le causse de Limogne (Lot) : les cabanes en pierre sèche

 

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