EN UZÈGE, LES CABANES « EN BONNET » SONT-ELLES ANTÉRIEURES AUX CABANES « CARRADES » ? Christian Lassure Pour fonder l'affirmation que, dans une aire donnée, un type morphologique de cabanes est antérieur ou postérieur à un autre, il faudrait pouvoir disposer de séries d'édifices dûment datés. C'est loin d'être le cas avec les humbles bâtisses que nous étudions. De fait, il n'exite, à notre connaissance, qu'une seule région où de telles séries se rencontrent et soient exploitables : c'est la région d'Uzès dans le Gard. S'y dressent en effet une cinquantaine de cabanes millésimées (1). Si l'on prend les cabanes en forme d'ogive (tronquée ou non) ayant un millésime inscrit sur la dalle fermant leur voûte, on constate qu'on a un étalement des constructions sur une période allant de 1741 à 1838, avec le plus grand nombre de millésimes entre 1791 et 1838 (abstraction faite d'un millésime bien plus tardif, et isolé, 1881).
Si l'on prend les cabanes en forme de pyramide (à faces curviligne ou non) ayant un millésime gravé sur la dalle terminale, on a une floraison étalée sur deux décennies seulement, de 1803 à 1824. Mais si l'on tient compte de deux autres cabanes pyramidales millésimées non pas sur la dalle fermant la voûte mais sur le linteau pour l'une (1784), et sur les piédroits de l'entrée pour l'autre (1738), on obtient une période de construction étalée de 1738 à 1824.
En d'autres termes, en se fondant sur ces statistiques, on peut affirmer que loin d'y avoir une succession du type pyramidal au type ogival (2), les deux types ont coexisté pendant le grand mouvement de construction des cabanes uzégeoises. On n'est donc pas passé, par la grâce d'un progrès technique, de la cabane ronde à la cabane carrée. Ce sont peut-être des priorités différentes en matière de coût et de prestige chez les commanditaires qui expliquent la concomitance des deux formes. Il faut garder présent à l'esprit que la cabane « en bonnet » évite d'avoir à faire des angles et, ce faisant, permet d'économiser le matériau. Mais en revanche que la cabane « carrade », avec ses quatre angles chaînés, est le signe de l'aisance de son propriétaire. NOTES (1) Cf. Christian Lassure et Christiane Chabert, Étude comparée des mouvements de construction de cabanes en pierre sèche dans les Pouilles (Italie) et dans l'Uzège (Gard, France) d'après les millésimes gravés, dans Pierre sèche, La lettre du CERAV, bulletin de liaison No 9, septembre 1997. (2) Contrairement à ce qu'affirme, sans fournir de preuves, l'auteur de l'article « Le style architectural des capitelles du département du Gard », paru dans le Bulletin de la Société d'étude des sciences naturelles de Nîmes et du Gard, t. 61, 1997, pp. 94-105, en part. pp. 97-98. Pour imprimer, passer en mode paysage © CERAV Référence à citer :: Christian Lassure page d'accueil sommaire datation
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